LAS VEGAS - Jamais repêché, il signe un contrat avec les Flames de Calgary pour obtenir son premier avant-goût de la LNH, puis il part disputer une saison en Russie et il revient, et ensuite, il lutte contre les blessures et le doute. Mark Giordano a emprunté un chemin bien différent au fil de sa carrière de joueur de hockey.
Les efforts de Giordano lui ont permis de gagner le Norris
Le joueur des Flames célèbre son titre de meilleur défenseur de la LNH avec son entraîneur de patinage
© Gerry Thomas/Getty Images
Mercredi soir, la destination du capitaine des Flames, c'était l'estrade de la Cérémonie de remises des trophées de la LNH 2019 présentée par Bridgestone, lui qui était largement victorieux du trophée Norris à titre de meilleur défenseur de la Ligue.
Gagnants des trophées : Calder: Pettersson | Lady Byng: Barkov | D.G. de l'année: Sweeney | King Clancy: Zucker | Ted Lindsay: Kucherov | Masterton: Lehner | Selke: O'Reilly | Jack Adams: Trotz | Vézina: Vasilevskiy | Messier: Simmonds | O'Ree: Rico Phillips | Hart: Kucherov
Giordano a reçu 165 des 171 votes de première place pour un total de 1690 points, bien loin devant les 720 points obtenus par Brent Burns des Sharks de San Jose, le lauréat du trophée Norris en 2017, et les 585 points attribués à Victor Hedman du Lightning de Tampa Bay, qui l'a emporté en 2018.
« C'est une sensation plutôt irréelle, pour être bien honnête, a dit Giordano. J'y ai mis beaucoup de travail au fil des ans. J'ai eu bien des hauts, bien des bas. J'ai vraiment commencé à croire en moi quand je suis revenu de la Russie (en vue de la saison 2008-09). C'est une bonne sensation d'être mentionné dans la même phrase que (Burns) et Victor et tous les grands joueurs qui ont remporté ce trophée dans le passé. »
Giordano, qui a 35 ans, a enregistré des sommets en carrière pour les mentions d'aide (57) et les points (74) en une saison, lui qui a disputé 78 matchs. Il a été le deuxième marqueur chez les défenseurs de la LNH en 2018-19. Il a été le meilleur patineur, toutes positions confondues, au chapitre du différentiel à plus-39.
Le Torontois de naissance devient seulement le quatrième joueur de 35 ans ou plus à remporter le Norris depuis que la LNH a commencé à remettre cet honneur. Les autres sont Nicklas Lidstrom (quatre fois vainqueur), Doug Harvey (trois) et Al MacInnis (une).
« Je tire beaucoup de fierté à travailler fort en dehors de la glace, à me garder en bonne forme physique, a-t-il indiqué. Reste que ce n'est pas facile de jouer dans la trentaine avancée. Nous en sommes tous conscients, alors que nous essayons de durer le plus longtemps possible. Le fait d'être reconnu de la sorte à mon âge, c'est un moment qui est vraiment spécial pour ma famille et moi.
« Peu importe à quel niveau tu joues, tu vas toujours douter un peu. Ces pensées vont toujours être présentes. J'avais la passion du hockey et j'adore tellement ce sport. Je suis un partisan de ce sport. Je suis prêt à y mettre le travail, en espérant que je pourrai continuer à jouer à ce niveau. La saison dernière, je me sentais vraiment bien physiquement, alors j'espère pouvoir continuer. »
Des membres de la famille Giordano étaient prêts à célébrer la victoire, puisqu'ils avaient fait faire des casquettes « We The Norris » (Nous sommes le Norris), en référence au slogan « We The North » adopté par les Raptors de Toronto, les champions de la NBA.
Et assis dans la première rangée se trouvait Brad Wheeler, l'entraîneur de patinage de Giordano depuis 15 ans, qui laissait échapper des larmes de joie.
« Je pourrais m'étendre dans ma tombe ce soir et mourir heureux », a déclaré Wheeler au moment où le clan Giordano se dirigeait à l'arrière-scène pour la séance de photos avec les émotions à fleur de peau, bien après que le Norris eut été présenté. « Même mes rêves ne sont pas aussi beaux. »
Giordano a trouvé bien drôle de voir son cher ami presque fondre en larmes sur son siège pendant la cérémonie.
« 'Wheels' est le plus content, et de loin, les larmes coulaient et je ne vais pas laisser passer ça sans le taquiner un peu », a lancé Giordano, qui a payé le vol à Wheeler et à son épouse en direction de Las Vegas afin de le remercier pour son amitié et le travail qu'ils ont accompli ensemble.
Vingt-quatre heures plus tôt, Wheeler parlait déjà de la possibilité de « faire lever le toit » tant il allait célébrer. Pendant une décennie et demie, il a été le préparateur et entraîneur sur glace de Giordano, aidant le capitaine des Flames à se mettre en forme durant la saison morte et le conseillant à distance durant la saison.
« Remporter le Norris signifierait tellement », a dit Wheeler, âgé de 58 ans, qui veille à l'entraînement de Giordano du mois de mai jusqu'au début du mois d'août sur une patinoire de Brampton, en Ontario, à environ 40 km au nord-ouest de Toronto.
« Le Norris, ce serait une récompense pour tout le travail que Gio fait. Il n'y a personne comme lui. C'est une machine, c'est pourquoi je l'adore. »
Leur travail ensemble n'a pas été sans défis, toutefois. Le 25 février 2015, Giordano s'est déchiré un tendon du biceps, ce qui a mis fin à sa saison au moment où il était un candidat pour le Norris puisque les 48 points qu'il avait récoltés le plaçaient à égalité au premier rang des marqueurs chez les défenseurs de la LNH. Il s'est toutefois très bien remis de son opération et il n'a raté que cinq matchs au total au fil des quatre dernières campagnes.
Wheeler savait qu'il avait quelqu'un de spécial sous la main, il y a 15 ans, après qu'un ami eut dit à Giordano, avec qui il jouait au hockey balle, qu'il aurait intérêt à se rendre au complexe sportif South Fletchers à Brampton.
Leur relation a évolué. C'est devenu davantage un partenariat qu'une relation enseignant-étudiant, même à distance durant la saison. Ils sont toujours en communication. Wheeler enregistre tous les matchs des Flames, les décortique et lui fait part de ses opinions par téléphone ou au moyen d'une série de textos.
«Ses habitudes de travail, je ne mens pas, sont bien au-dessus de l'ordinaire, a dit Wheeler de Giordano. Personne ne travaille plus fort que lui, sur la glace et en dehors. Personne.
« Il connaît son corps, et je le pousse seulement aussi loin qu'il est capable de le faire sur la glace. Ils disent qu'il est fou en dehors de la glace aussi. Durant l'été, il est fou, il fait comme Sidney Crosby. Sa priorité no 1, c'est la glace et l'entraînement.
« Mais sa plus grande force, c'est ici, a dit Wheeler, en se touchant la tempe. Son QI de hockey est extraordinaire. Tu peux enseigner à quelqu'un comment faire quelque chose, mais cette personne doit quand même être capable de penser. »
À la maison, a fait savoir Wheeler, au moins 500 personnes allaient regarder la télédiffusion de la cérémonie, prêts à y aller d'une célébration qui allait effectivement « faire lever le toit ».
« L'autre jour, j'ai organisé une séance de patinage libre et Mark a patiné avec des jeunes de 10 à 14 ans, a-t-il indiqué. Il a fait certains des exercices que nous faisons ensemble, et les parents prenaient des photos. Je n'ose pas calculer avec combien de mes jeunes il a patiné en 15 ans. Gio s'est retrouvé sur la glace huit fois déjà cet été. Nous avons commencé à travailler un peu plus tôt que d'habitude, mais nous savions qu'il allait rater une semaine complète cette semaine. Quand nous y retournerons, ç'aura fait près de deux semaines. Nous avons du retard à rattraper ! »
Et Wheeler est tout simplement enchanté de voir Giordano prendre autant de poids à Vegas. La version miniature du Norris qu'il apportera dans son bagage à main lors de son vol de retour à Toronto, jeudi matin, lui a fait gagner quelques livres… mais celles-ci sont tout à fait les bienvenues.