La cérémonie d'intronisation de la cuvée 2018 du Temple de la renommée du hockey aura lieu lundi. Le groupe d'élus comprend le commissaire de la LNH Gary Bettman ainsi que Willie O'Ree, le premier joueur noir à évoluer dans la LNH, dans la catégorie des bâtisseurs, en plus des anciens joueurs Martin Brodeur, Martin St-Louis, Alexander Yakushev et Jayna Hefford. Le journaliste principal de NHL.com Dan Rosen brosse ici le portrait de St-Louis.
Martin St-Louis se demande si son parcours vers la LNH aurait été aussi long et sinueux s'il avait 20 ans aujourd'hui, au moment où les petits joueurs sont des étoiles, remportent des trophées et sont couronnés champions.
Probablement pas, se dit-il.
« Tout aurait été plus facile pour moi », a affirmé St-Louis.
Martin St-Louis n'a pas pris le chemin le plus facile
Le champion de la Coupe Stanley a voulu faire taire les doutes à son sujet en route vers le Temple de la renommée
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Mais ce chemin plus facile aura-t-il été la meilleure chose pour St-Louis, un homme de 5 pieds 8 pouces? Le chemin plus facile aurait-il motivé l'ailier droit à devenir un joueur digne d'une intronisation au Temple de la renommée ?
« Je ne sais pas, a répondu St-Louis. Est-ce que j'aurais eu une crotte sur le coeur? »
Probablement pas, et c'est là un élément important à considérer.
St-Louis n'a pas emprunté le chemin le plus facile vers cet honneur ultime dans le monde du hockey. Il sera intronisé au Temple de la renommée du hockey, lundi, plus de 20 ans après avoir commencé à se forger une carrière dans la LNH, en cherchant à faire taire les doutes à son sujet à chaque instant.
St-Louis a pris sa retraite en 2015 avec un total de 1033 points (391 buts, 642 passes) en 1134 matchs. Il a remporté la Coupe Stanley, la médaille d'or olympique, le trophée Hart, le trophée Art Ross à deux reprises et le trophée Lady Byng à trois occasions.
« J'aime mieux venir à bout de choses difficiles que de voir tout me réussir facilement, parce que lorsque tu rencontres des difficultés, tu n'es pas aussi prêt à relever le défi si tu n'as jamais été mis à l'épreuve, a déclaré St-Louis. Les difficultés ont fait de moi la personne et le joueur que je suis devenu. »
Ç'a été difficile d'obtenir une opportunité au début. Une excellente carrière d'une durée de quatre ans à l'Université du Vermont n'a pas réussi à attirer suffisamment l'attention de la LNH. Jamais repêché, St-Louis a dû signer un contrat avec Cleveland dans la Ligue internationale de hockey pour faire ses débuts dans les rangs professionnels en 1997.
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Le Québécois originaire de Laval a assez bien joué (50 points en 56 matchs) pour que les Flames de Calgary lui accordent son premier contrat de la LNH au mois de février 1998. St-Louis a passé les deux saisons suivantes à faire la navette entre la Ligue américaine de hockey et le quatrième trio des Flames.
« Ç'a été difficile comme départ, mais c'est la seule manière de faire que je connaissais, a souligné St-Louis. Rien ne m'était jamais venu facilement, alors pour jouer au plus haut niveau, je n'ai jamais pensé que ce serait plus facile que les autres étapes de ma jeune carrière. Mais une fois que j'ai réussi à bien m'installer, ç'a décollé assez rapidement. »
Les Flames ont exercé la clause d'option d'un an qu'il y avait au contrat de St-Louis après la saison 1999-2000. Mais ça, c'était avant que le nouveau directeur général Craig Button s'amène, le 6 juin 2000.
Les dépisteurs des Flames ne croyaient pas que St-Louis allait être capable de bien se débrouiller dans la LNH, alors ils l'ont laissé sans protection en vue du repêchage d'expansion du 23 juin 2000. Il n'a pas été réclamé par les Blue Jackets de Columbus ni par le Wild du Minnesota, alors les Flames ont racheté le reste de son contrat, faisant de lui un joueur autonome sans compensation.
St-Louis a signé un contrat de deux ans avec le Lightning de Tampa Bay, le 31 juillet 2000. Il a récolté 40 points (18 buts, 22 passes) en 78 matchs en 2000-01, montrant ainsi qu'il pouvait être un joueur régulier dans la LNH.
Une fracture à la jambe a gâché sa saison en 2001-02, mais St-Louis a amassé 70 points (33 buts, 37 aides) en 2002-03 et a gonflé sa production à 94 points (38 buts, 56 passes) en 2003-04, quand il a remporté le Art-Ross et le Hart en plus de mener le Lightning jusqu'à la conquête de la Coupe Stanley.
Seulement sept joueurs dans l'histoire de la LNH ont remporté les trophées Art-Ross et Hart, de même que la Coupe Stanley au cours de la même saison.
Le but le plus important de sa carrière, il l'a marqué en Finale de la Coupe Stanley 2004, quand il a donné la victoire aux siens en deuxième période de prolongation lors du sixième match de la série. Ce filet a gardé le Lightning en vie et a donné à l'équipe une chance de remporter la série et la Coupe Stanley aux dépens des Flames de Calgary lors du septième affrontement.
« Il avait de bonnes habitudes de travail, il avait du coeur. J'ai joué avec beaucoup de bons joueurs, mais c'est Martin qui était le meilleur dans ces deux aspects-là », a déclaré l'ancien défenseur de la LNH Dan Boyle, qui a joué avec St-Louis à Tampa Bay ainsi qu'avec les Rangers de New York. « Je n'ai jamais vu quelqu'un travailler aussi fort ou aimer le hockey autant que Martin. Il ne baissait jamais les bras. Il n'arrêtait jamais de pourchasser la rondelle, il n'abandonnait pas avant qu'un jeu soit terminé. Si j'avais à commencer à bâtir une équipe avec d'anciens coéquipiers, Martin serait mon premier choix. »
St-Louis avait un désir insatiable de s'améliorer. Tous ses coéquipiers le vantent à cet égard.
Car c'était contagieux.
« Il était celui que tout le monde suivait », a affirmé Steven Stamkos, qui est devenu le capitaine du Lightning quand St-Louis a été échangé aux Rangers, le 5 mars 2014. « S'il allait s'entraîner en gymnase après l'entraînement, tu voulais le suivre et y aller toi aussi. S'il allait sur la patinoire avant l'entraînement pour tirer des rondelles, tu le suivais. Il avait une attitude professionnelle exemplaire et, quand j'étais jeune, je trouvais que c'était facile de suivre ses traces et de réaliser le lien qu'il y avait entre les habitudes de travail et le succès dans cette ligue. L'exemple à suivre, c'était lui. »
L'attaquant des Rangers Chris Kreider, qui a grandi dans la région de Boston et avait une affiche de St-Louis sur le mur de sa chambre, se souvient clairement des moments où St-Louis était debout dans le cercle droit avant et après l'entraînement, à attendre que quelqu'un lui fasse des passes pour qu'il puisse exercer son tir.
Kreider s'est ensuite souvenu du filet vainqueur de St-Louis en prolongation, au moyen d'un tir du cercle droit, à l'occasion du quatrième match de la Finale de l'Association Est qui a donné aux Rangers une avance de 3-1 dans la série contre les Canadiens de Montréal. New York a éventuellement remporté la série en six rencontres.
« Il n'a pas été ici très longtemps, mais je l'ai vu faire ça des milliers de fois, a indiqué Kreider. Ce n'était pas par hasard. Il allait se placer à sa place habituelle et il a pratiqué ce tir des centaines de milliers de fois pour pouvoir vivre un moment comme celui-là. »
Dans la ronde précédente, St-Louis a marqué ce qui était facilement le but le plus émotif dans sa carrière, trouvant le fond du filet le jour de la fête des Mères, le 11 mai 2014. C'était deux jours après le décès de sa mère, France, à l'âge de 63 ans en raison d'un infarctus. Son but a aidé les Rangers à créer l'égalité dans la série du deuxième tour dans l'Association de l'Est contre les Penguins de Pittsburgh, à trois matchs de chaque côté.
St-Louis a par ailleurs amassé une mention d'aide sur le but en avantage numérique de Brad Richards qui a donné la série aux Rangers, marqué en deuxième période du septième match pour une victoire de 2-1 de la formation new-yorkaise.
« Il était aussi quelqu'un qui avait un côté léger incroyable, qui gardait tout le monde aux aguets et faisait rire les gars. Mais quand venait le temps d'aller chercher une victoire dans quelque chose, son esprit de compétition était sans pareil », a affirmé Stamkos.
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L'entraînement n'était jamais une corvée pour St-Louis parce qu'il voyait ça comme une occasion de s'améliorer.
« Même à mes meilleures années, je n'ai jamais eu le sentiment que j'étais le meilleur patineur, que j'avais les meilleures mains, que j'avais le meilleur tir, a déclaré St-Louis. Il y avait toujours des joueurs qui pouvaient faire certaines choses mieux que moi, mais je me sentais bien parce que j'étais bon pour trouver des façons de m'améliorer. »
Il passait toujours son temps à travailler sur son bâton, ses patins, ses techniques.
« Je n'étais pas le genre à me dire, "Oh, ça va finir par revenir", a fait remarquer St-Louis. Pour maintenir ce niveau-là et jouer aussi longtemps que je l'ai fait, et connaître autant de succès, pour me faire considérer comme un membre du Temple de la renommée, je savais que ça n'avait rien à voir avec la chance. Il fallait travailler pour y arriver. »
L'attitude et les habitudes de travail de St-Louis lui ont donné confiance, si bien qu'il a commencé à croire qu'il pouvait et devait être l'homme à qui on pouvait faire confiance quand l'issue du match était à l'enjeu.
Stamkos a fait savoir que St-Louis et lui avaient l'habitude de blaguer à propos de la façon dont St-Louis, quand il était au banc des siens, fixait l'entraîneur du regard - une façon de demander qu'on l'envoie de nouveau sur la patinoire.
« Il a toujours été convaincu qu'il pouvait faire la différence dans un match, a dit Stamkos. Martin n'avait pas d'interrupteur. Il n'avait qu'une seule vitesse, à fond la caisse. »
L'attitude de St-Louis représentait parfois un défi pour les entraîneurs.
John Tortorella, qui a dirigé St-Louis à Tampa Bay de 2001 à 2008, a dit qu'il le trouvait parfois agaçant parce qu'il lui posait toujours des questions et il exigeait des réponses. Si la réponse ne le satisfaisait pas, St-Louis posait d'autres questions.
Tortorella, l'entraîneur des Blue Jackets de Columbus, a déclaré qu'il a dû dire plusieurs fois à St-Louis d'arrêter de lui taper sur les nerfs. Sans surprise, St-Louis l'écoutait rarement.
« Il te prenait parfois à rebrousse-poil, mais le but ultime, c'était de gagner, a indiqué Tortorella. J'ai vraiment apprécié cet aspect de sa personnalité. »
En cours de route, St-Louis est devenu un mentor.
Derek Stepan, le joueur de centre des Coyotes de l'Arizona qui a joué avec St-Louis à New York, a déclaré qu'il communique avec St-Louis pour lui demander conseil.
« Comme la saison dernière par exemple, en début de saison quand nous n'avions pas beaucoup de victoires, je l'ai appelé et je lui ai demandé quelque chose comme, "Qu'est-ce que tu peux me dire de bon? Aide-moi un peu" », a raconté Stepan.
Il n'y avait personne que St-Louis pouvait appeler quand il a commencé sa carrière. Il n'y avait pas de recette à suivre ou de mentor pour l'épauler.
St-Louis a dû tout faire par lui-même, à la dure.
« Quand tu réussis des choses alors que personne ne s'attendait à ce que tu réussisses, je pense que tu te sens deux fois mieux quand tu réussis, a noté St-Louis. Moi, c'est ce qui m'a motivé. Tu penses que je ne suis pas capable? Je vais te le montrer. C'était ce qui m'animait quand je jouais - le goût de leur montrer. »