LAMOUREUX BADGE CHAUMONT

SALT LAKE CITY, UTAH – À huit ans, Maveric Lamoureux prédisait qu’il jouerait un jour dans la LNH. À 14 ans, il disait à ses parents, Patrick et Isabelle, qu’il porterait les couleurs de l’équipe canadienne au Championnat mondial junior dans le futur. À 20 ans, le jeune défenseur a réalisé ses deux visions.

Lamoureux n’a rien d’un prophète. Il a cru en ses rêves et il a une grande détermination. Dans un café d’un hôtel du centre-ville de Salt Lake City, le défenseur géant de 6 pieds 7 pouces et 213 livres arbore une casquette du Club de hockey de l’Utah. Une tasse de chocolat chaud dans la main droite, il raconte avec le sourire aux lèvres les premières fois où il a évoqué ce rêve fou de patiner sur une glace de la LNH.

« Quand j’avais huit ans, je disais à mes parents qu’ils allaient me voir à la télévision puisque j’allais jouer au hockey. Si je devais réaliser une recherche à l’école, je choisissais souvent un sujet qui tournait autour du hockey. Je pouvais aussi parler de P.K. Subban dans un exposé oral. En quatrième année, je disais que je voulais devenir un joueur de hockey. J’avais le même discours en secondaire un. Il y a des enseignants qui cherchaient à me ramener sur terre. Et je les comprends, ils me rappelaient de trouver un chemin plus réaliste. C’est la même chose quand un jeune dit qu’il deviendra un astronaute. Les chances sont minces.

« Je n’étais pas un phénomène comme un Connor Bedard dans ma jeunesse, a-t-il continué. J’étais un bon joueur et je jouais souvent contre des plus vieux, mais ce n’était pas écrit dans le ciel que je me destinais à une carrière dans la LNH. »

Cette carrière dans la meilleure ligue au monde demeure toute jeune, toute récente. Rappelé des Roadrunners de Tucson la semaine dernière, Lamoureux a joué deux matchs avec l’équipe de l’Utah : contre l’Avalanche du Colorado et les Kings de Los Angeles.

« J’ai le sentiment que ça reste encore irréel, a-t-il affirmé. Tout se déroule rapidement. Je me suis fait rappeler par l’Utah mardi soir (22 octobre) vers 22 h. J’ai participé à un premier entraînement mercredi avec l’équipe et je jouais mon premier match le jeudi soir. Le vendredi, je sautais dans l’avion pour Los Angeles et j’obtenais mon deuxième match le lendemain. Aujourd’hui (dimanche), c’est ma première journée plus tranquille. Ça n’arrête pas de rouler. Mais je ne chiale pas, je suis bien heureux. »

LAMOUREUX CAFE

Une présence contre MacKinnon

Bill Armstrong, le directeur général en Utah, a lancé un SOS à Lamoureux en raison des blessures à deux défenseurs de son top-4, Sean Durzi et John Marino.

Après quatre petits matchs dans la Ligue américaine où il a marqué deux buts et ajouté une passe, le Québécois s’est retrouvé parachuté dans un vestiaire de la LNH.

« Oui, ça arrive plus vite que prévu, a-t-il reconnu. Quand je me suis fait retrancher à la fin du camp, j’ai parlé avec Bill (Armstrong). Il m’avait dit que j’avais besoin de jouer 40 matchs dans la Ligue américaine. Il ne voulait pas bousculer les plans et jouer au yoyo avec moi en me rappelant et en me retournant. Je ne croyais pas recevoir un rappel après quatre matchs dans la Ligue américaine.

« Je venais de trouver un appartement depuis cinq jours à Tucson. Je venais de m’acheter une voiture, mais je n’ai pas encore eu le temps de la conduire. Je suis parti après avoir obtenu l’approbation pour l’achat! »

Pour son baptême dans la LNH, Lamoureux a joué contre l’Avalanche du Colorado au Delta Center de Salt Lake City. Il a rapidement compris qu’il ne jouait plus pour les Voltigeurs de Drummondville.

« Il y a un moment dans le match où Nathan MacKinnon s’en venait sur moi à un contre un. Au départ, je n’avais pas eu le temps de réaliser que c’était MacKinnon avec la rondelle. Quand j’ai compris que c’était lui, je me suis dit : “oh merde”. C’était la première fois que je me retrouvais contre un gars de ce calibre. Oui, tous les joueurs sont bons dans la LNH, mais il y a peu de grandes étoiles comme MacKinnon. Heureusement, il ne m’a pas battu. J’ai tenu ma place. »

Lamoureux a ressenti une autre forme de stress bien avant sa première présence.

« J’ai compris que j’étais dans la LNH lors de mon tour des recrues pendant l’échauffement. À mes deux derniers pas avant de sauter sur la glace, j’ai réalisé que c’était réel. Ce n’était pas juste un rêve. J’étais très nerveux. J’ai réussi un top corner (coin supérieur) à gauche avec mon premier tir et pour le deuxième, j’ai pogné un top corner à droite. Je me suis calmé un peu après ça. Je ne voulais pas manquer mon premier tir ou trébucher sur la glace. Quand j’étais dans le tunnel, Josh Doan criait après moi. Il me disait de ne pas manquer le filet. Je n’ai pas raté mes tirs. »

Il n’y a pas juste Doan qui le regardait sauter sur la glace. Dans les gradins à Salt Lake City, il y avait aussi ses parents et sa copine (Sara-Kim). Les dirigeants de l’équipe avaient organisé en secret le déplacement du petit clan vers les montagnes de l’Utah.

« J’espérais les voir pour mon premier match, mais mes parents me disaient qu’ils ne pouvaient pas se déplacer, a-t-il raconté avec le sourire. Je croyais un peu ce qu’ils me racontaient et leurs excuses, puisqu’ils étaient en vacances. Mais quand j’ai vu mes parents et ma blonde après l’entraînement du matin, c’était tellement un beau moment et un soulagement. »

Le clan Lamoureux a aussi suivi pour le deuxième match à Los Angeles, mais ils ont maintenant remis le cap sur le Québec.

La confiance de Tourigny

À ses deux premiers matchs, Lamoureux a obtenu la confiance d’André Tourigny et de Mario Duhamel, l’entraîneur des défenseurs, avec un temps de jeu de près de 19 minutes contre l’Avalanche et de près de 21 minutes contre les Kings. Il a formé un duo avec le vétéran Ian Cole.

Le choix de premier tour (29e en 2022) des Coyotes de l’Arizona se réjouit de son utilisation, mais il garde aussi les deux pieds sur terre.

« Je suis très heureux, ils me font confiance, a-t-il répliqué. J’ai un bon temps de jeu, ça fait du bien pour la confiance. Je n’ai pas juste huit minutes d’utilisation. Je sens qu’ils veulent m’essayer. Si j’avais mal joué, ils ne m’auraient pas envoyé aussi souvent sur la patinoire. »

Avec les absences de quatre à six mois de Durzi (opéré à une épaule) et de Marino pour trois à quatre mois (opéré au bas du dos), Tourigny aura besoin de se trouver un plan B avec ses défenseurs. Et il pourrait se tourner vers le grand droitier.

« Je n’ai reçu aucune promesse, c’est une guerre tous les jours pour prouver que j’ai ma place avec l’équipe, a-t-il rappelé. Je veux rester ici. Je ne voudrais pas repartir dans deux semaines pour la Ligue américaine. J’ai parlé avec mon agent (Dominic De Blois) et il m’a dit de garder une mentalité d’une journée à la fois. »

Un championnat sans y participer

Avant l’euphorie de ses premiers pas dans la LNH, Lamoureux a traversé une autre gamme d’émotions. Il a vécu de loin la conquête du trophée Gilles-Courteau des Voltigeurs de Drummondville.

Opéré à l’épaule droite au mois d’avril dernier, quelques mois après sa participation au Mondial junior, il a vu sa dernière saison dans la LHJMQ prendre fin au mois de mars. C’était la deuxième fois qu’il passait sous le bistouri. L’autre fois, c’était en 2022, avant le repêchage, pour son épaule gauche.

S’il a fait sa convalescence en Arizona pour rester avec les médecins de l’équipe, le grand défenseur était à Drummondville quand les Voltigeurs ont balayé le Drakkar de Baie-Comeau en quatre matchs.

« Il y avait un mélange de joie et de tristesse. Je n’avais pas joué un seul match en séries avec les Voltigeurs. J’aurais voulu embarquer sur la glace et vivre ce moment. Je fermais aussi mon chapitre chez les juniors. J’ai fait un gros câlin à mon père et ma mère sur la glace lors des cérémonies. Mon père m’a chuchoté à l’oreille que ce n’était pas fini et que j’allais ouvrir un autre chapitre à un autre niveau. Et que ça allait être un beau chapitre. »

Papa Patrick avait raison. Il n’y a donc pas juste Maveric qui a un talent pour lire dans le futur.