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TORONTO – « J’étais comme une momie. » Shea Weber ne faisait pas une référence à l’Égypte antique avec cette petite phrase, mais bien à son propre corps.

En marge de son intronisation au Temple de la renommée du hockey à Toronto, Weber a décrit son état de santé lors de la finale de la Coupe Stanley de 2021 avec les Canadiens avec cette puissante image.

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Weber endurait une multitude de blessures. Il avait des ennuis avec ses genoux et ses chevilles. Mais il avait également poursuivi son chemin en séries malgré une déchirure à l’aine.

« Nous gagnions nos matchs et je voulais jouer », a affirmé Weber lors d’une mêlée de presse dans l’une des salles du Temple de la renommée du hockey à Toronto. « Je m’étais déchiré l’aine à Vegas en finale de l’Ouest. Je n’ai pas manqué un seul match. Mais j’avais des bandages un peu partout sur le corps. Ils faisaient des bandages très solides ! »

Pour les six matchs de la finale de l’Ouest contre les Golden Knights, Weber n’a jamais joué moins de 23 minutes. En finale contre le Lightning de Tampa Bay, le numéro 6 a obtenu un temps de jeu qui oscillait entre 22 et 25 minutes lors des cinq rencontres.

Il existait un seul remède: celui d’endurer la douleur. Il avait aussi besoin d’une bonne dose de courage.

« J’arrivais toujours trois heures avant un match. J’étais un des premiers à l’aréna. Je me pointais dans la salle des thérapeutes et je recevais mes traitements. Je recevais mes bandages juste avant la rencontre. »

Weber n’a jamais informé Dominique Ducharme, Luke Richardson ou Marc Bergevin de la gravité de ses blessures.

« Mon père était probablement le seul à le savoir à part les thérapeutes, a-t-il précisé. Il y avait quelques joueurs qui s’en doutaient, ils me voyaient sur la table (thérapeutes). Je n’en parlais pas, je cachais bien des informations. Marc (Bergevin) ne le savait pas, les entraîneurs non plus. »

Le colosse défenseur et les soigneurs du CH entretenaient donc une forme de code secret.

« Ils gardaient les informations privées. Je les avertissais. Je ne voulais pas qu’ils en parlent aux entraîneurs et au DG. C’était probablement une décision idiote ! »

Sur le plan physique, Weber se posait des questions depuis plusieurs mois. Ça remontait bien avant les six matchs contre Vegas en finale de l’Ouest.

« J’ai joué cette saison (2020-2021), mais pendant toute l’année, je me posais des questions à savoir si je pouvais continuer, a-t-il précisé. J’avais souvent de la misère à sortir de mon lit, j’étais trop magané. C’était une saison compressée, en plus, au retour de la COVID-19.

« Je commençais à vieillir et je ne soignais pas mes blessures aussi rapidement. J’avais déjà subi quelques opérations, mais je ne regagnais pas toute ma force. Je voulais me donner une chance de jouer. Je me disais que je devais jouer une saison au complet pour savoir si je pouvais encore jouer. Je n’aidais pas ma propre cause. »

La dernière danse

Le parcours féérique et improbable du CH avait pris fin avec une élimination en cinq matchs en finale contre le Lightning.

Sur la glace à Tampa, après la défaite de 1-0 dans le cinquième match, Weber était inconsolable. S’il avait toujours bien caché ses émotions comme capitaine, le défenseur avait de la difficulté à retenir ses larmes. Carey Price, qui jouait aussi malgré une blessure à un genou, et plusieurs autres coéquipiers avaient tenté de consoler Weber.

« Est-ce qu’on doit reparler de cette finale ? », a lancé le défenseur originaire de la Colombie-Britannique quand on lui a demandé de décrire le mélange d’émotions à cet instant précis entre la douleur d’une défaite et la possibilité d’un dernier match dans la LNH.

« C’était la portion la plus difficile. Je me doutais que c’était probablement la fin pour moi, a-t-il mentionné. J’avais une bonne idée qu’il s’agissait de ma dernière danse (last kick in the can). Mais pour les jeunes, des gars comme Nick Suzuki et Cole Caufield, ils ne ressentaient pas les mêmes émotions après la finale. Ils se disaient qu’ils étaient pour obtenir une autre chance. Je leur avais dit que tu ne peux jamais rien prédire. J’avais patienté 16 ans avant d’atteindre la finale pour une première fois. Ce n’est pas facile. Tu ne peux rien prédire.

« Je traversais bien des émotions. Il y avait la défaite en finale, mais aussi mon dernier match dans la LNH. J’avais de la difficulté à digérer tout cela. »

Weber n’a plus jamais posé un patin sur une patinoire de la LNH après cette rencontre du 7 juillet 2021.

« Je retire beaucoup de fierté de ce parcours en 2021. J’en garde de bons souvenirs. Mais j’aurais tellement aimé vivre les séries devant des gradins remplis au Centre Bell. J’avais joué des matchs en séries à Montréal avant 2021 et je ne peux toujours pas imaginer l’ambiance pour une finale de la Coupe Stanley. Il y aurait eu de l’électricité dans l’air. »

Un tir bloqué de Jack Eichel

Dans sa carrière de plus de 1000 matchs (1038) avec les Predators de Nashville et le CH, Weber avait déjà jonglé avec la réalité de cacher de petits et gros bobos.

Il l’avait fait au début de la saison 2017-2018, à sa troisième année à Montréal. Au premier match de la saison contre les Sabres au KeyBank Center de Buffalo, il s’était blessé en bloquant un tir de Jack Eichel.

« Oui, j’y repense encore à ce tir bloqué. Il m’avait frappé directement sur la cheville. C’était un tir des poignets. Je croyais que c’était une fracture dès l’impact. J’avais passé un examen par résonance magnétique à l’aréna après le match et les médecins n’avaient rien vu. Nous aurions eu besoin de passer un deuxième test rapidement. Mais quand une personne me dit que je peux endurer la douleur, je me disais que je pouvais jouer. J’ai joué plusieurs matchs malgré ma blessure. »

Auteur d’une passe dans ce gain de 3-2 en tirs de barrage contre les Sabres, Weber avait joué près de 30 minutes (29:30). Il avait distribué sept mises en échec et bloqué quatre tirs.

Il avait finalement joué 26 matchs au début de la saison 2017-2018 avant de se faire opérer au pied gauche. C’était ça, Shea Weber.

Quand on lui pose la question à savoir s’il aurait pu mieux gérer son propre corps, l’ancien capitaine du Tricolore et des Predators n’hésite pas une seule seconde avant de répondre.

« Je n’ai aucun regret. Je jouais pour l’équipe, je n’hésitais pas à sacrifier mon corps. Ça faisait partie de ma mentalité. Je me disais que tant que je pouvais aider l’équipe, je devais continuer et endurer la douleur. Je voulais agir comme un leader. Je ne peux pas le regretter. Le hockey m’a procuré tellement de bonnes choses dans ma vie. J’aimerais encore jouer aujourd’hui, mais c’est la vie. »

Weber ne joue plus depuis les séries de 2021. Mais il a maintenant sa place parmi les immortels du hockey. Et il a fait son entrée au Temple dès sa première année d’admissibilité.

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