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MONTRÉAL - Le meilleur coup des Canadiens en vue du Repêchage 2024 de la LNH a peut-être été celui qu’ils n’ont jamais fait.

Quand Kent Hughes et Jeff Gorton ne se sont pas présentés à Fort Lauderdale une semaine avant l’encan, les spéculations étaient à leur comble. La ruse faisait toutefois partie de la stratégie de l’organisation, qui a usé de psychologie inversée pour augmenter ses chances de mettre la main sur un espoir convoité ayant évolué en Russie la saison dernière.

L’espoir en question? Ivan Demidov, bien sûr.

Demidov, le « numéro 2 par consensus », selon les dépisteurs de TSN. Demidov, « l’espoir aux habiletés individuelles les plus développées dans la cuvée de cette année », selon Elite Prospects. Et Demidov, le joueur sélectionné au 5e rang au total par les Canadiens au Repêchage 2024 de la LNH.

« Pour ceux qui se demandent pourquoi on ne s’est pas rendus en Floride, c’est parce qu’on ne voulait pas révéler à quel point on était intéressés envers Demidov », a confié Hughes après le premier tour du Repêchage. « On n’avait pas besoin de le passer en entrevue. »

Bref, l’ailier russe a toujours été une carte cachée dans le jeu de la direction.

« On connaissait Demidov depuis l’an dernier », a raconté le DG du Tricolore aux journalistes. « Avant de faire notre choix l’année dernière, on était déjà emballés par lui, dépendamment de notre position au classement. »

Le futur de Demidov à Montréal était peut-être en latence depuis plus d’un an, mais compte tenu des variables en jeu, rien n’était garanti. Puis, le cinquième choix au total est tombé entre les mains des Canadiens à la Loterie du Repêchage, concrétisant davantage le plan de clamer le joueur de 18 ans.

Ce n’est toutefois que lorsque les Blue Jackets de Columbus ont appelé le nom de Cayden Lindstrom au quatrième rang que les Canadiens ont enfin pu jeter leur dévolu sur Demidov. Et ça n’a pas été fait sans artifices.

Céline Dion a été invitée sur scène pour annoncer le choix de l’équipe de sa province d’origine, prêtant sa voix à l’acte en appelant Demidov, et accueillant au passage le plus récent membre de l’organisation.

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Difficile de rendre la chose plus typique de Las Vegas. Pourtant, ç’a été le cas pour Michael Hage. On y reviendra plus tard.

Poursuivons pour l’instant avec Demidov, en qui le Bleu-blanc-rouge retire beaucoup plus qu’une arme offensive de pointe. Loin de lever le nez sur les 23 buts et 60 points en 30 matchs de l’attaquant, qui lui ont valu d’être nommé Joueur par excellence du SKA Saint-Pétersbourg, dans le meilleur circuit junior de Russie, pour une deuxième année consécutive, ce serait néanmoins le caractère de l’athlète de 6'1" qui aurait fait pencher la balance en sa faveur aux yeux du directeur général des Canadiens.

« Il a confiance en lui sans être arrogant », a expliqué Hughes, qui reconnait un autre de ses premiers choix au repêchage en Demidov. « Quand tu paries sur un jeune qui doit quitter l’Europe pour venir à Montréal, avec toute la pression que ça implique, comme ce fut le cas de [Juraj] Slafkovsky, ce ne sera pas toujours facile. Il faut être résilient pour rebondir après avoir encaissé un coup. Et on a grandement confiance que, tout comme Slafkovsky, Demidov a ça en lui. »

Cette confiance émanait de l'ailier droit lorsqu'il s'est présenté sur le podium pour affronter les médias montréalais. Dans une situation où la pression était élevée, Demidov semblait à l'aise, tout en s’exprimant dans une langue qu’il a commencé à apprendre il y a seulement un an et demi.

« Les partisans adorent le hockey, tout comme moi. C’est pour ça que la pression ne soit pas un problème pour moi », a déclaré Demidov.

« Quand les gens restent dans leur zone de confort, ils ne ressentent pas de pression, et c’est mauvais pour leur développement. J'adore quand les gens aiment le hockey. C’est pourquoi c’est une ville extraordinaire, à mon avis », a-t-il confié à l’équipe de contenu des Canadiens quelques semaines après le Repêchage.

Le natif de Serguiev Possad, en Russie, a identifié Kobe Bryant comme étant son idole sportive, inspiré par son instinct destructeur.

Montréal, c'est l’heure d’accueillir la mentalité Mamba.

Pour en revenir à Las Vegas, Hage, que les Canadiens ont sélectionné au 21e rang au total, a vécu son propre moment d’émotions en étant repêché par l’équipe qu’il idolâtrait dans sa jeunesse, notamment en raison du décès tragique de son père l’été dernier.

« Quand j’étais plus jeune, je portais toujours le numéro 9, car mon père adorait Maurice Richard. Il serait tellement fier en ce moment », a dit le natif d’Oakville, en Ontario.

Quand Bobrov a annoncé son nom, l’émotion était palpable dans la Sphere, et même jusqu’à Montréal. Dans les gradins, sa mère avait les larmes aux yeux, et Hage pouvait à peine retenir les siennes.

« C’est un rêve », a dit un Hage visiblement secoué dans une scène du documentaire du Repêchage des Canadiens.

La saison dernière, le joueur de 18 ans a présenté une fiche de 33-42-75 en 54 matchs avec le Steel de Chicago, dans l’USHL. Il a aussi reçu le prix d’excellence E.-J.-McGuire, décerné annuellement à l'espoir qui incarne le mieux l'engagement envers l'excellence par la force de caractère, la compétitivité et les capacités athlétiques.

« C’était l’un des plus gros noms du Repêchage », a déclaré le co-directeur du recrutement amateur du Tricolore, Nick Bobrov. « Un joueur comme lui, dans une année normale, n’aurait pas glissé au 21e rang. »

Aatos Koivu (fils de l’ancien capitaine des Canadiens Saku Koivu), Logan Sawyer, Tyler Thorpe, Mikus Vecvanags, Owen Protz, Ben Merrill, Makar Khanin et Rasmus Bergqvist complètent la cuvée de repêchage des Canadiens pour 2024.

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Comme chaque année, tous les choix ne s’avéreront pas des coups de circuit. Reste à savoir combien se rendront sur le marbre et combien seront confinés au banc des joueurs.

Dans l'histoire récente, Hughes et Gorton ont cependant montré leurs habiletés à jongler avec des choix hauts placés au Repêchage. C’est d’ailleurs pour cette raison que le premier, en tant que directeur général, et le second, en tant que vice-président exécutif des opérations hockey, ont été embauchés : rebâtir l’équipe et établir les bases d’un succès à long terme.

Et, avec de jeunes talents prometteurs comme Slafkovsky, Owen Beck, Lane Hutson, David Reinbacher, Jacob Fowler, Demidov et Hage, les Canadiens ont rassemblé les pièces d’un brillant avenir.

« On est choyés d’avoir mis la main sur les joueurs qu’on a repêchés à chaque encan », a déclaré Bobrov après celui de cette année. « Ils sont de saveurs, de formats et de styles différents. Tu as besoin de divers types de joueurs pour compétitionner pour une coupe Stanley. Ils ne peuvent pas tous être pareils, mais ils doivent tous avoir un réel désir de gagner et accepter la pression qui vient dans une ville comme Montréal. On a confiance que les gars qu’on a enrôlés dans l’organisation composeront bien avec cette pression. »

Cet texte a été traduit par Anne-Charlotte Pellerin.