THUMBNAIL

MONTRÉAL – Le parc d’attractions La Ronde n’ouvre pas ses portes avant la mi-mai, mais les montagnes russes étaient en marche toute la saison pour le Rocket de Laval, qui a raté de peu les séries éliminatoires pour la première fois en trois ans.

Comme dans le manège Goliath, une turbulente saison 2023-2024 en dents de scie attendait le club-école des Canadiens dans l’AHL. En fait, l’entraîneur-chef du Rocket, Jean-François Houle, avait vu juste lors du Camp de perfectionnement du Tricolore en juillet 2023, prédisant « des moments difficiles à surmonter en début de saison » pour la jeune formation. Et moments difficiles il y a eu. Le faible rendement de 1-6-1 de Laval pour amorcer la campagne a certainement servi de leçon d’humilité au talentueux groupe en devenir.

L’instructeur du Rocket est néanmoins demeuré optimiste en vue de la deuxième moitié du calendrier. Dans le même propos évoqué en juillet, Houle avait affirmé que « après Noël, ils vont avoir beaucoup appris de cette ligue, et ils ne seront que meilleurs. » Il avait raison. Le club affilié à Montréal s’est hissé au haut de la structure métallique, atteignant son sommet le 24 janvier, en conclusion d’un segment de 10 matchs suivant les Fêtes, lors duquel il a cumulé une fiche de 8-1-1.

Ensuite, les flux et les reflux de la saison se sont poursuivis, mais de façon moins prononcée. Les bas n’étaient plus aussi bas, les hauts pas aussi hauts, et ce n’est qu’à l’avant-dernier match de l’année que les espoirs du groupe ne se sont réellement effondrés, le Rocket étant officiellement éliminé de la course aux séries et de la possibilité de mettre la main sur la coupe Calder.

Mais les derniers mois n’avaient pas pour seul but l’atteinte des séries; un autre objectif était de trouver un équilibre entre les succès immédiats et la progression à long terme de l’organisation. Houle et ses adjoints avaient pour mission de développer le jeune noyau – qui comprend une multitude de joueurs aspirant très certainement à la LNH – tout en essayant de remporter des matchs et de tout faire « de la bonne façon ».

ROY

« Tu veux être sûr que le joueur se développe comme il le faut; il faut que tu le mettes dans certaines positions pour qu’il prenne de l’expérience dans certaines facettes du jeu, ce qui n’est pas évident », a indiqué Houle lors de son bilan de fin de saison.

Le gardien Jakub Dobes, le défenseur Logan Mailloux et l'attaquant Joshua Roy font partie de ceux qui bouclaient leur ceinture de sécurité et effectuaient un premier tour de manège dans la Ligue américaine.

« Quand le noyau est jeune, il y a une courbe d’apprentissage, [et] la seule façon de s’assurer que la courbe monte, c’est en jouant des matchs », a souligné Houle.

Ils ont donc suivi cette ligne de pensée et Dobes a défendu la cage des siens 51 fois (le plus haut total à égalité parmi tous les gardiens de l’AHL), Mailloux a pris part aux 72 rencontres de Laval et Roy a enfilé ses patins à 41 occasions dans l’AHL, en plus de revêtir l’uniforme des Canadiens 23 fois dans la LNH.

Comme Martin St-Louis le mentionne souvent, l’expérience n’a pas de prix et ne s’achète pas. Bien qu’il soit difficile de quantifier monétairement la valeur d’une saison recrue, certains jeunes du Rocket peuvent affirmer en avoir eu pour leur argent, alors que d’autres choisiront de se rabattre sur leur expérience vécue pour espérer connaître une campagne 2024-2025 plus fructueuse.

MAILLOUX

Mailloux compte parmi ceux qui ont rapporté gros à leur première année. L’arrière de 20 ans a mené tous les défenseurs recrues du circuit grâce à une production de 47 points (14B, 33A), se classant au troisième rang de tous les défenseurs de la Ligue. De plus, le choix de premier tour en 2021 a été nommé au sein de l’Équipe d’étoiles de l’AHL de 2023-2024 et il a pu faire ses débuts dans la LNH le 16 avril contre les Red Wings de Detroit.

« C’était amusant. J’essayais simplement d’y aller un jour à la fois, de me présenter et de m’améliorer chaque jour », a rapporté Mailloux à propos de son année avec le Rocket. « Tu ne peux pas faire un grand pas vers l’avant tous les jours ni toutes les semaines ni tous les mois, même, mais je crois que je me présentais en voulant m’améliorer un petit peu chaque jour. »

Dobes a lui aussi fait des remous à sa campagne recrue. Le gardien tchèque a monté un dossier de 24-18-6, accordant en moyenne 2,93 buts par rencontre et présentant un pourcentage d’efficacité de ,906. Lorsqu’interrogé à son bilan de fin d’année, Houle a rapidement nommé le cerbère de 22 ans comme étant le joueur dont le progrès l’avait le plus impressionné. Après avoir alloué trois buts ou plus à 11 de ses 13 premiers départs dans l’AHL, Dobes n’a concédé trois buts ou plus que 13 autres fois à ses 38 matchs suivants.

DOBES

« Je ne suis pas vraiment déçu des [difficultés] vécues », a admis Dobes lors de la journée de clôture à la Place Bell. « Je crois que ça m’a vraiment aidé à devenir un meilleur joueur de hockey. C’est une progression. Je ne suis pas encore un produit fini. Je crois que c’est une bonne chose que ce soit arrivé ainsi. J’ai besoin de vivre des difficultés et de rebondir ensuite. Je crois que la saison m’a été vraiment bénéfique pour devenir un meilleur gardien. »

Roy a fait des allers-retours entre Laval et Montréal. Après avoir rapidement fait quelques ravages à ses débuts dans l’AHL, amassant 18 points à ses 14 premiers matchs, l’attaquant de 6 pi et 186 lb n’a pas inscrit son nom à la feuille de pointage lors des sept affrontements subséquents, amenant certains à se demander s’il était prêt pour la Ligue nationale.

Cependant, l’avant âgé de 20 ans a rapidement retrouvé sa forme des beaux jours avant d’être rappelé par le grand club en janvier et de mettre fin au débat. En 23 sorties dans l’uniforme du Tricolore, le natif de Saint-Georges, en Beauce, a offert une contribution de neuf points (4B, 5A) et, qui plus est, l’impression d’être où il devait être dans sa carrière. Aujourd’hui, Roy entend solidifier son statut de joueur de la LNH.

« Après avoir goûté à la LNH, tu veux y retourner, et c’est sûr que ce sera mon but en arrivant au camp l’année prochaine », a-t-il déclaré aux médias présents le 21 avril.

Alors que la saison avançait, plus de jeunes se sont joints à Laval. David Reinbacher est arrivé fraîchement de l'EHC Kloten et de la Ligue nationale suisse, enregistrant cinq points (2B, 3A) à sa fiche en 11 matchs avec le Rocket. Puis, Luke Tuch et Florian Xhekaj se sont amenés pour une saucette dans l’AHL, disputant respectivement deux et trois rencontres avant la fin du calendrier – un séjour bref, mais que Houle ne prend pas à la légère.

REINBACHER

« L’expérience qu’un jeune joueur obtient en sept ou 10 matchs – regardez ce que ç’a amené à [Jayden] Struble l’an dernier. Struble a été avec nous pour six ou sept matchs, il était confiant, il est revenu cette année, a eu un bon camp, a commencé la saison avec nous, puis s’est mis à jouer dans la LNH, s’est souvenu Houle. On ne peut pas sous-estimer les bienfaits d’un ou de deux, sept ou 10 matchs pour une recrue. On ne peut tout simplement pas. Ç’a de la valeur et ça les prépare pour l’année suivante, ça ne fait aucun doute. »

Reinbacher semble en accord.

« À mes yeux, chaque match est compétitif. Je joue chaque match avec un but en tête, peu importe le classement. J’ai pris chaque match comme un défi, comme une nouvelle chance de montrer mon jeu et comme une occasion d’offrir ma meilleure performance », a expliqué le défenseur autrichien. « Ç’a été une super expérience que de me joindre à une équipe qui essaie de se qualifier pour les séries. Ils m’ont accueilli chaleureusement et ça m’a rendu vraiment heureux », a-t-il ajouté.

Se développer dans un contexte gagnant, comme le dit Houle, est certainement plus facile que le faire dans un environnement perdant. Avec 33 gains cette saison, les recrues du Rocket ont pu savourer le goût de la victoire. Cependant, au-delà des résultats, les chemins sinueux empruntés par Laval à sa septième saison dans le circuit pourraient s’avérer encore plus profitables dans l’ascension de l’organisation des Canadiens pour les années à venir.

Un texte d'Evan Milner, traduit par Florence Labelle.