DETROIT-- Il y a quelque chose de magique autour d'Elias Pettersson.
L'entraîneur-chef des Red Wings de Detroit Jeff Blashill l'a vite réalisé en regardant la vidéo d'un match. À l'œuvre, le joueur de centre recrue des Canucks de Vancouver réussissait des petits bijoux des deux côtés de la patinoire grâce à ses mains, son coup de patin et son sens du hockey.
Pettersson volait la rondelle à ses adversaires avant même qu'ils ne réalisent qu'il était à proximité. Il gagnait les batailles et conservait la rondelle alors qu'il semblait isolé, en plus d'attirer les adversaires pour créer de l'espace pour ses coéquipiers. Le Suédois de 6 pieds 2 pouces, 176 livres était en mesure, non pas grâce à sa vitesse, mais plutôt en trompant l'adversaire, en changeant de rythme et avec son maniement de rondelle, de se créer une marge de manœuvre.
Pettersson continue d'impressionner chez les Canucks
Le départ canon de l'attaquant recrue suédois suscite l'enthousiasme à Vancouver
© Dave Reginek/Getty Images
Blashill avait l'impression de voir à l'œuvre un joueur qu'il a bien connu : le magicien Pavel Datsyuk.
C'était la première fois que Blashill comparait un autre joueur à Datsyuk, et certainement pas un joueur dont la carrière dans la LNH vient à peine de s'amorcer. Mais à l'approche du match entre les Red Wings et les Canucks au Little Caesars Arena, mardi, l'entraîneur-chef a mis ses troupiers en garde : « Pettersson est la version plus mince de Pavel ».
« Tu ne peux pas prendre un instant de repos, a dit Blashill. Tu ne sais jamais vers quelle direction la rondelle va aller. »
La rondelle, elle a terminé sa course dans le fond du filet à la 14e minute de la première période, mardi, quand Pettersson a décoché un lancer frappé du haut du cercle des mises en jeu lors d'une montée. Il est devenu le cinquième joueur de l'histoire de la LNH à marquer 10 buts en 10 matchs. La recrue ne faisait que commencer.
En fin de première période, alors que Pettersson était en possession de la rondelle lors de la relance, il a eu la présence d'esprit de regarder le tableau indicateur pour savoir combien de secondes il disposait afin de décocher un lancer. En l'espace d'une seconde, il a traversé la patinoire, déjoué trois joueurs pour créer une chance de marquer. Puis, en prolongation, son lancer frappé a touché la tige verticale. Quelques centimètres plus bas et les Canucks l'emportaient. En fusillade, la rondelle a malheureusement glissé loin de sa portée et Vancouver a dû s'avouer vaincu 3-2.
Pettersson mène les recrues de la LNH avec 16 points, sept de plus que son plus proche poursuivant, et ce, même s'il a raté six matchs après avoir été victime d'une commotion cérébrale. À Vancouver, il est source d'espoir et de beaucoup d'excitation, quelques mois après la retraite des jumeaux Daniel et Henrik Sedin.
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« Il a joué 10 matchs dans la Ligue, et il est déjà un des meilleurs joueurs. C'est majeur pour l'organisation », a souligné le joueur de centre Bo Horvat.
N'oublions pas que Datsyuk s'est joint aux Red Wings à l'âge de 23 ans en 2001-2002. Pettersson aura 20 ans lundi. Datsyuk avait été un choix de sixième ronde (171e) lors du repêchage de 1998 et il avait un rôle de soutien quand l'équipe a gagné la Coupe Stanley à son année recrue, lors de laquelle il a amassé 11 buts en 70 rencontres. Pettersson a été choisi cinquième en 2017 et il a déjà un rôle clé dans l'équipe.
Ça ne veut pas dire que Pettersson sera meilleur que Datsyuk l'a été. Mais ça signifie qu'il a de l'avance sur la légende des Red Wings à son âge et que les attentes, jusqu'à présent, sont plus élevées.
Horvat l'a décrit comme un joueur unique. Pettersson lui, indique qu'il ne veut pas imiter personne, même si sa première idole était Peter Forsberg et qu'il aimait regarder Datsyuk et Nicklas Backstrom lorsqu'il était jeune.
« Présentement, je veux être moi-même. »
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Ce qui éblouit le plus chez la recrue, c'est la combinaison de son talent, son intelligence, sa créativité et sa capacité de jouer contre des joueurs plus vieux et plus gros. Un apprentissage qui s'est fait naturellement, car Pettersson est originaire d'Ange, une ville de 3000 personnes située au centre de la Suède. Avec si peu de gens, il y avait beaucoup de temps de glace disponible à l'unique aréna de la ville.
Son père, Torbjorn, possédait les clés de l'aréna et conduisait la resurfaceuse à titre de gérant du programme jeunesse. Son frère, Emil, de cinq ans son ainé, a été un choix de sixième ronde (155e) des Predators de Nashville en 2013 et est actuellement avec les Admirals de Milwaukee dans la Ligue américaine.
Quand Elias avait trois ans, Emil enfilait l'équipement de gardien et permettait à son frère de s'entraîner. Puis, lors des années suivantes, leur père allait les chercher après l'école quatre ou cinq fois par semaine pour les amener à l'aréna afin qu'ils s'amusent pendant quelques heures.
« On utilisait notre imagination, se remémore Elias. Je ne me souviens pas exactement les exercices que nous faisions. Je ne faisais que patiner et m'amuser. En grandissant, c'était la chose que j'aimais le plus faire. »
Puis, après le souper, les jeunes revenaient à l'aréna, cette fois, afin de prendre part à des entraînements structurés.
« J'ai probablement eu droit à plus de temps de glace que des gars qui sont nés dans des villes plus importantes. »
Elias était alors un enfant de petite taille et pas très gros, jusqu'à ce qu'il connaisse une poussée de croissance avant l'école secondaire. Ça ne l'empêchait pas de jouer des matchs contre son frère et ses amis.
« S'il jouait avec nous, plutôt qu'avec les jeunes de son âge, c'est parce qu'il était capable de suivre notre niveau de jeu », raconte Emil.
Au hockey mineur, Elias était aussi surclassé.
« C'était une bonne affaire pour moi d'être petit, de ne pas peser beaucoup, parce que ça m'a forcé à développer une façon d'encaisser les mises en échec, gagner les batailles avec intelligence et non pas avec la force brute. Je pense que ça m'a aidé d'une bonne manière de ne pas être le plus gros sur la glace. »
« Quand tu es jeune, ça aide d'avoir un grand frère qui a joué. Mais en ce moment… Je n'ai pas grand-chose à lui enseigner », a ajouté Emil en rigolant.
Emil a quitté le club de Vaxio de la Ligue élite de Suède la saison dernière afin de rejoindre Milwaukee. Au même moment, son frère faisait le saut de la deuxième division pour la même équipe. Des joueurs se demandaient comment allait se débrouiller le cadet. Emil leur a dit qu'il ne serait pas surpris qu'Elias amasse beaucoup de points.
Mais il ne se doutait certainement pas que son frère terminerait au premier rang des pointeurs de la Ligue avec 56 points, dont 24 buts, en 42 matchs. Il a répété l'exploit en séries éliminatoires et Vaxio a remporté le championnat. Sans surprise, Elias a été nommé recrue de l'année, mais aussi joueur par excellence des séries.
« C'est pareil à ce qui se passe présentement, dit Emil. J'ai toujours su qu'il jouerait dans la LNH et qu'il aurait un impact sur la glace, mais 16 points en 10 matchs? Personne ne pouvait prédire cela. »
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L'entraineur-chef des Canucks Travis Green a indiqué qu'il n'avait pas de doute qu'Elias pourrait jouer dans la LNH, mais peut-être pas au poste de centre puisqu'il avait été muté à l'aile gauche en Suède depuis un an. Il lui a donc téléphoné durant la saison morte pour lui dire qu'il voulait qu'il s'entraîne comme joueur de centre.
« C'est un jeune intelligent, a opiné Green. Il avait déjà compris dans sa tête, je pense, qu'il allait avoir la rondelle davantage au centre. En Europe, la glace est plus grande, donc tu peux jouer à l'aile et quand même avoir beaucoup de temps avec la rondelle. Ici, la patinoire est moins large. Il y a pas mal moins d'espace le long de la bande. »
Pettersson a rapidement répondu aux interrogations. Le défi des Canucks est maintenant de diminuer les attentes et d'être réaliste. C'est un beau problème et il ne touche pas Pettersson directement.
Vendredi, après sa performance de cinq points dans la victoire des Canucks 7-6 contre l'Avalanche du Colorado, un journaliste lui a demandé ce qu'il pensait de la façon dont il avait remporté la victoire. »
Pettersson l'a immédiatement interrompu.
« Nous l'avons remportée. »
Puis, après la défaite face aux Red Wings, Pettersson s'est dit heureux d'avoir marqué 10 buts en 10 matchs, mais que les Canucks venaient de perdre le match et qu'il avait autre chose en tête que de célébrer.
« Il y a des gars qui sont faits pour avoir du succès, et c'est son cas, a dit Green. Quand il parle, c'est honnête, il est très humble et il ne s'enfle pas la tête. »
Emil a d'ailleurs remarqué à quel point son frère est devenu plus mature lors des dernières années.
« C'est impressionnant qu'il ait connu autant de succès depuis deux saisons, mais qu'il soit toujours la même personne. Il n'a pas changé pour sa famille et ses amis. »
Son attitude envers le hockey n'a pas changé non plus. Il aime cela comme quand il était un enfant qui s'amusait sur une patinoire.
« Le jeu est tellement rapide, rappelle Elias. Tu dois l'être tout autant. J'essaye toujours d'avoir une longueur d'avance et de réussir mes jeux. C'est ça, le hockey. Parfois ça marche, parfois non, et j'essaye de trouver un autre moyen.
« Personne n'est parfait. C'est sûr que je fais des choses mieux que d'autres, mais je veux m'améliorer dans toutes les facettes. Si mon tir était parfait, je marquerais toujours. Plus tu pratiques, meilleur tu seras dans les matchs. J'ai toujours pensé de cette manière.
« Je ne savais pas à quoi m'attendre dans la LNH. Présentement, je vis un rêve. »