Shane Doan est encore un peu incrédule, et encore un peu stupéfait aussi, alors qu'il s'apprête à devenir le premier joueur des Coyotes de l'Arizona à voir son numéro être retiré par l'équipe.
Le capitaine de longue date des Coyotes avait 40 ans quand il a pris sa retraite à l'issue de la saison 2016-17. Il a disputé 21 saisons avec la concession, à Winnipeg d'abord avec les Jets d'origine, puis quand celle-ci s'est installée en Arizona. Son numéro 19 sera soulevé au plafond du Gila River Arena, dimanche, avant le match qui sera disputé entre les Coyotes et les Jets (21h HE ; TSN3, FS-A, NHL.TV).
Doan touché et honoré de voir son numéro être retiré
Les Coyotes soulèveront le no 19 de leur ancien capitaine au plafond pour fêter ses 21 ans de carrière
© Rocky W. Widner/NHL/Getty Images
« Inattendu, un petit peu mal à l'aise aussi, a dit Doan en faisant allusion à cet hommage qu'on lui rend. En même temps, je suis tellement content de voir que tant de gens vont venir, des gens qui me sont chers. Ce sera tellement plaisant.
« Le fait de pouvoir partager ce moment avec les partisans ici en Arizona et d'avoir des amis et ma famille autour de moi ; c'est là quelque chose dont tu n'oses pas rêver mais ce sera quelque chose de formidable à vivre. »
Keith Tkachuk, Jeremy Roenick et Teppo Numminen des Coyotes, ainsi que Bobby Hull, Thomas Steen et Dale Hawerchuk de la première version des Jets ont été intronisés au sein du Cercle d'honneur des Coyotes, mais aucun d'entre eux n'a vu son numéro être retiré.
Le fait que Doan soit nerveux à quelques heures de la cérémonie n'a rien de surprenant, lui qui a été élevé dans un milieu modeste et dans la foi chrétienne sur une ferme, a fait remarquer le gérant de l'équipement des Coyotes Stan Wilson, son ami le plus proche.
« Le plus drôle, c'est qu'il n'a pas tellement changé au fil des ans », a dit Wilson, qui a fait la connaissance de Doan peu de temps après que les Jets eurent fait de l'Albertain de 18 ans originaire de Halkirk leur choix de premier tour (septième au total) lors du repêchage 1995 de la LNH. « Il a toujours été quelqu'un de foncièrement heureux, c'est juste qu'il est plus vieux maintenant. Quand il s'est amené avec nous, il était poli, un bon petit jeune, il avait les habitudes de travail qu'ont les fils de fermier et c'est comme ça qu'il a avancé. »
Doan a avancé au point de disputer 1540 matchs du calendrier régulier dans la LNH pour la concession des Coyotes/Jets. Il est 16e dans la Ligue, à égalité avec Johnny Bucyk (1955-78), pour les matchs en carrière dans la LNH. Bucyks'est aligné avec les Red Wings de Detroit pendant deux saisons et avec les Bruins de Boston durant 21 campagnes.
Gordie Howe détient le record de la LNH au chapitre des matchs disputés avec 1767, tous dans l'uniforme des Red Wings sauf les 80 derniers. Les seuls joueurs qui ont pris part à davantage de matchs avec une seule concession que Doan sont le défenseur Niklas Lidstrom avec les Red Wings (1564 matchs de 1991 à 2012) et le joueur de centre Alex Delvecchio avec les Red Wings (1550 de 1950 à 1974).
Doan est premier dans l'histoire des Coyotes/Jets dans la plupart des catégories importantes, telles que les matchs disputés, les buts (402), les mentions d'aide (570), les points (972) et les filets vainqueurs (69). Il a succédé à Numminen au poste de capitaine le 10 septembre 2003, et il a gardé le 'C' jusqu'à sa retraite. Doan a connu 13 saisons d'au moins 20 buts, notamment en 2015-16, à son avant-dernière campagne, quand il a trouvé le fond du filet à 28 reprises.
« Évidemment il faut attendre, mais (son chandail) aurait dû être soulevé au plafond dès le lendemain de sa retraite », a affirmé le défenseur des Panthers de la Floride Keith Yandle, qui a joué avec Doan chez les Coyotes de 2006 à 2014. « Ce qu'il a donné à cette équipe, à l'organisation, à la ville, c'est inimaginable. Il n'y aurait pas d'équipe dans cette ville si ce n'était de lui.
« Il est l'un des gars les plus inspirants qu'il m'ait été donné de côtoyer au fil de ma carrière, sur la glace et en dehors. »
Doan a vu la LNH lui remettre deux trophées soulignant ses qualités de meneur au cours de sa carrière. Il a remporté le trophée commémoratif King Clancy, remis au joueur qui affiche les plus belles qualités de leadership sur la glace et en dehors et qui a contribué de façon importante à sa communauté, en 2010, ainsi que le prix du leadership Mark Messier en 2012.
Reste qu'il persiste à minimiser l'importance du rôle qu'il a joué pour aider à garder les Coyotes dans la grande région métropolitaine de Phoenix malgré les changements de propriétaires au fil des années. Il a indiqué que sa recette pour avoir le plus d'impact possible dans son entourage était fort simple : il faut s'impliquer auprès des gens dans son milieu et avoir leur bien-être à coeur.
« Quand tu deviens capitaine, tu commences à sentir que tu as des responsabilités, a-t-il noté. J'ai commencé à sentir que l'équipe était mon équipe, et que tout le monde, y compris les soigneurs et les membres du personnel de soutien et de l'équipement, étaient comme des membres de ma famille. Ç'a joué un rôle important ça aussi. »
Selon Wilson, la constance dans la façon d'agir de Doan a fait une grande différence.
« Il s'impliquait beaucoup dans ce qui se passait, sur la glace et en dehors, a indiqué Wilson. Dans sa tête, c'était son équipe.
« Quand tu passes par tous les hauts et les bas que cette concession a connus, tu te sens de plus en plus responsable de l'équipe et des gens qui la composaient. C'est sa personnalité. Quand il y a eu des occasions d'aller ailleurs, il sentait que sa principale responsabilité, c'était d'essayer de s'assurer que ça fonctionne ici en Arizona. »
Outre son niveau d'excellence en tant que joueur, ce sont les nombreux liens que Doan a tissés avec la communauté qui lui ont permis d'avoir un impact.
Le Ice Den Scottsdale, le centre d'entraînement des Coyotes, a rendu hommage à Doan au mois d'août dernier en affichant son nom sur l'une de ses trois patinoires.
« J'ai passé pas mal de temps à cet endroit et je suis tellement reconnaissant qu'ils aient voulu y mettre mon nom, a-t-il affirmé. Je ne savais vraiment pas quoi dire. Mais c'est pas mal 'cool' de voir ma signature sur la glace. »
Kris King était le capitaine des Jets quand Doan s'est amené dans la LNH en 1995 et il joué avec lui la saison suivante, quand l'équipe s'est installée à Phoenix. Aux yeux de King,qui est maintenant le vice-président principal des opérations hockey de la LNH, le fait de nommer une patinoire en son honneur n'est qu'un signe parmi d'autres en ce qui a trait aux façons dont Doan a eu une influence bénéfique sur la communauté.
« Le contexte est unique en Arizona, puisque ce n'est pas un milieu naturel pour le hockey, mais Shane a rendu respectable le fait de joueur au hockey et maintenant, il y a tellement de jeunes qui jouent à tellement d'endroits. C'est Shane qui doit recevoir le crédit pour ça, en raison de ce qu'il a fait au sein de la communauté, a noté King. Ce n'est pas un marché traditionnel pour le hockey, mais le portrait a changé, il est en voie de changer.
« Je crois qu'il a gagné le respect de bien des gens en raison de la personne qu'il est, et encore plus en raison de ce qu'il a fait en dehors de la patinoire. Et il en a fait beaucoup sur la glace. »
L'entraîneur des Coyotes Rick Tocchet, qui a disputé trois saisons avec Doan (1997 à 2000), a indiqué que son ancien coéquipier a été le pilier de la concession et son héritage se fait toujours sentir.
« Les gars qui ont joué avec lui, eh bien, ç'a aidé mon équipe parce qu'ils tiennent l'un à l'autre », a dit Tocchet de l'édition actuelle des Coyotes qui, avant les matchs de vendredi, se trouvaient à un point de la deuxième place de quatrième as donnant accès aux séries éliminatoires de la Coupe Stanley dans l'Association de l'Ouest. « C'est quelque chose qu'il a légué aux joueurs qui sont encore avec nous, le fait que ça leur tienne à coeur à ce point. »
Au quotidien, le rythme de vie de Doan n'a pas vraiment ralenti depuis qu'il a pris sa retraite. Il a été en mesure de passer plus de temps avec son épouse Andrea et leurs quatre enfants, Gracie, 20 ans, Josh, 17 ans, Karys, 14 ans, et Carson,12 ans.
Doan continue de s'occuper de huit des 12 chevaux qu'il garde à son ranch dans la région de Phoenix ainsi qu'au ranch de près de 100 chevaux dont s'occupent son père et son cousin à Halkirk.
« J'ai grandi avec des chevaux, a noté Doan. La blague dans la famille, c'est que nous organisions un rodéo à tous les samedis chez moi, que mes oncles et mon grand-père font tous partie du Temple de la renommée du rodéo canadien et que j'aspirais à devenir soit un cowboy, soit un joueur de hockey, et que je n'étais pas assez coriace pour devenir un cowboy.
« Le ranch où j'ai grandi, nous avions 50 chevaux et c'était mon emploi d'été. Je plaçais les selles sur les chevaux et je faisais des promenades dans les sentiers. J'étais à cheval sept heures par jour du début de juin jusqu'à la fin de septembre. »
Doan prend également le temps d'aider l'équipe de son fils Josh dans un rôle d'entraîneur. Celui-ci a eu 17 ans le 1er février et c'est un attaquant qui joue pour l'équipe des moins de 16 ans des Coyotes Juniors de Phoenix.
« L'équipe est plutôt bonne et nous avons beaucoup de plaisir, a dit Doan. Ç'a été formidable. Je voyage pas mal avec eux et c'est probablement avec eux que je passe le plus de temps maintenant. C'est un des choses que j'aime vraiment beaucoup. »
Le département des opérations hockey de la LNH a embauché Doan le 26 octobre 2017. Il s'est dit enchanté d'avoir pu garder un lien avec la Ligue, qualifiant le tout « d'apprentissage incroyable qui me permet d'être entouré de gens que je respecte et que j'admire vraiment.
« J'ai surtout accepté en raison des gens, parce que c'était une occasion de travailler avec (le vice-président exécutif et directeur des opérations hockey) Colin Campbell et Kris King, a indiqué Doan. Je ne connaissais pas (les membres du personnel des opérations hockey) Mike Murphy, Rod Pasma ou Kay Whitmore avant, mais je suis vraiment chanceux qu'on m'ait demandé de faire ça. C'est un véritable cadeau du ciel de pouvoir passer du temps avec ces gars-là. J'ai comme l'impression de me retrouver dans un vestiaire et je suis le jeune qui vient d'arriver.
« J'adore le fait de pouvoir travailler dans le hockey avec eux, de pouvoir les écouter et de les voir interagir avec les clubs et les dirigeants. Je voulais comprendre comme ça fonctionne en coulisses et comment ça se passe. »
Selon King, l'ajout de Doan s'est avéré un coup de circuit pour son département et ce, à bien des égards. Ce qui est arrivé lors de la Classique 100 de la LNH Banque Scotia 2017 à Ottawa l'en a convaincu.
Quelques jours avant qu'ait lieu le match extérieur au Parc Lansdowne, King voulait présenter Doan à des gens qui travallaient dans le domaine de la télédiffusion mais il n'a pas réussi à le trouver dans le stade.
« On était en train d'enlever les bâches qui étaient sur la patinoire, a indiqué King. Elles étaient retenues par des deux par quatre de 20 pieds et le voilà qui trouvait sur la patinoire, à transporter des deux par quatre sur son épaule, une dizaine d'un seul coup, en même temps que les ouvriers. Il n'a pas hésité à donner un coup de main ; on n'a pas eu besoin de le lui demander. Les gars étaient là à regarder un vétéran de 21 saisons dans la LNH à transporter du bois, et ça en disait pas mal long à son sujet. »
Selon Tocchet, il y a bien des raisons d'être fier du joueur qu'a été Doan.
« Il était tellement généreux et ses coéquipiers lui tenaient à coeur, a ditTocchet. Et il n'a joué que pour une seule concession ; c'est tellement rare. Il y a tellement de facteurs maintenant qui amènent quelqu'un à quitter, peu importe à quel point ce joueur a excellé ou est une personne formidable.
« Le fait qu'il soit arrivé à le faire, et qu'il l'ait fait malgré toutes les tempêtes qu'il ait dû traverser… Il a résisté à tout ça. »