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MONTRÉAL -Guy Lafleur n'a pas qu'été le meilleur joueur des années 1970 et un coéquipier hors-pair chez les Canadiens de Montréal. Il avait également des nerfs d'acier. Pierre Bouchard peut en témoigner.

Retour dans le temps, séries éliminatoires en 1976. Les Canadiens vont en découdre avec les Flyers de Philadelphie en finale. Les « méchants », Flyers, qu'on affuble du sobriquet de « Broad Street Bullies », sont à la recherche d'un troisième championnat d'affilée.
Les tactiques d'intimidation sont en vogue. Lafleur a une cible dans le dos. On promet de lui faire sa fête. Ce qu'on ne sait pas, c'est que le célèbre numéro 10 est victime de menaces de mort, qui n'ont rien à voir avec les Flyers.
Sa résidence sur la rive-sud de Montréal est sous surveillance policière 24 heures sur 24.
« Nous étions voisins dans ce temps-là et je voyais des voitures de police balisées en permanence devant sa maison », a relaté Bouchard, dimanche, avant l'hommage qu'on a rendu à « Flower » au Centre Bell.
« Il m'avait dit qu'il y avait quelque chose, mais il ne m'avait pas donné de détails, a continué l'ancien défenseur. Il a bien réagi face à la situation.
« Nous avions su par la suite que Jean Béliveau lui avait offert de partir à l'étranger pour un mois, mais il avait décidé de rester et de jouer.
« On nous a raconté que c'étaient des parieurs qui voulaient le déconcentrer parce qu'ils avaient misé sur les Flyers. Finalement, nous avions battu les Flyers en quatre matchs. J'espère que ces gars-là sont cassés aujourd'hui », a lancé le fils d'Émile « Butch » Bouchard avec une pointe d'humour.
Bouchard, âgé de 74 ans, faisait partie de la douzaine d'anciens coéquipiers de Lafleur qui ont tenu à lui rendre hommage et à évoquer de nombreux souvenirs.
Bouchard n'a pas pu s'empêcher de souligner que le destin fait drôlement les choses.
« Guy a toujours été le premier joueur de l'équipe à se présenter à l'aréna la journée des matchs. Il est maintenant un des premiers d'entre nous à partir. C'est d'une grande tristesse. C'est beaucoup trop jeune pour partir. »
Réjean Houle a dit avoir été très affecté la journée du décès de Lafleur, vendredi.
« Tout le bon temps que nous avons passé ensemble m'est revenu en mémoire, a-t-il expliqué. Plus ça va, avec le recul, je réalise qu'il était tanné de souffrir. Il a décidé de partir. On l'aimait beaucoup notre « Flower ». Il a fait beaucoup pour notre organisation. J'ai eu tellement de bon temps pour lui. »
« Au hockey, j'ai formé la 'kid line' avec lui et Marc Tardif. Les deux ont vite connu du succès. Il a fallu les ralentir un peu parce que dans ce temps-là, il fallait attendre son tour derrière les vétérans. Guy avait commencé à avoir moins de temps de glace et il n'avait pas été content de ça. »
Voici en rafale ce que ses anciens coéquipiers avaient à dire à son sujet avant l'hommage qui lui a été rendu, dimanche, au Centre Bell :
« Quand Guy est arrivé, après sa première pratique j'ai dit : ''Wow, il va faire tout un joueur de hockey''. J'avais gagné cinq fois la Coupe Stanley avant son arrivée et je savais que c'était impossible qu'on ne continue pas d'en gagner avec lui. On en a gagné cinq autres. »
« Ça fait 40 ans que je le connais, qu'on travaille ensemble. On a joué ensemble, on a été ambassadeurs ensemble… Quand je me lève le matin (depuis vendredi), il me manque quelque chose. » - Yvan Cournoyer

« Il y a des légendes qui surpassent tous les autres joueurs qui ont joué pour cette équipe au cours de son histoire. Ç'a tellement été bénéfique pour moi de passer du temps avec ces hommes en tant que coéquipier, dans le cas de Guy, ou simplement en leur piquant une jasette, comme ce fut le cas avec Jean Béliveau. Les discussions avec ces deux grands-là m'ont rendu encore meilleur et j'ai essayé de transmettre ça aux autres par la suite. »
« Guy était notre joueur le plus talentueux et il travaillait autant, sinon plus, que les autres joueurs. Il ne s'est jamais placé au-dessus de nous, mais nous savions qu'il l'était une fois que la rondelle tombait. C'était le reflet de sa personnalité. Il venait d'une petite ville et le poids des responsabilités qu'il portait sur ses épaules à l'extérieur de la patinoire était beaucoup plus important que celui que nous portions. Nous pouvions comprendre à quel point c'était lourd pour lui à certains moments, mais il a trouvé le moyen de bien gérer ça. » - Bob Gainey

« On savait que c'était une question de temps avant son décès. La tristesse et là. On revoit les années qu'il a eues et ce qu'il a fait pour nous. C'est beaucoup trop jeune pour partir. Guy était toujours le premier arrivé dans le vestiaire, prêt pour le match, mais là il est malheureusement l'un des premiers à partir. C'est d'une grande tristesse. »
« Tout le monde a un souvenir de Guy. Il était tellement dévoué. Il était au festival à telle place, une mise au jeu à l'autre. Il était partout. Il était tellement disponible pour le public. Je pense que les gens se souviennent de ça, de chaque petit évènement. Ça lui revient maintenant. Il ne le saura pas, mais sa famille en est témoin. » - Pierre Bouchard

« C'est très difficile. On vient de perdre un coéquipier qui faisait de nous une grande famille. C'est une grosse perte pour les Canadiens. On sait à quel point il était un grand ambassadeur. Ce sont des moments difficiles. C'est comme un mauvais rêve. C'est difficile de s'imaginer qu'on est rendus là. »
« On l'aime. Il va nous manquer beaucoup. C'était comme un frère. Il était tellement généreux, tellement bon avec le public. Il avait toujours du temps pour tout le monde. Il a été un exemple comme coéquipier par sa façon de travailler, de se présenter aux matchs. Il n'y avait pas de journées de congé pour Guy Lafleur. Il va nous manquer énormément. » - Guy Lapointe