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OTTAWA – La route de plus de 550 kilomètres entre Hearst et Sudbury en est une à travers les vastes forêts du nord de l’Ontario. Seulement quelques petits villages avec des noms amusants comme Moonshine ou Smooth Rock Falls viennent briser l’isolement.

C’est sur cette route que se déplacera un convoi formé de proches de Claude Giroux. Ils embarqueront sur la Transcanadienne à partir de sa ville natale de Hearst et feront les six heures pour atteindre l’Aréna communautaire de Sudbury, où les Sénateurs d’Ottawa affronteront les Penguins de Pittsburgh, dimanche, dans le cadre de Kraft Hockeyville 2024.

Dans l’entourage des Giroux, on retrouvera ses oncles, tantes, cousins et celle qui est probablement sa plus grande partisane, sa grand-mère de 80 quelques années, Hélène. Pour eux, le voyage n’a rien de long. C’est comme si Claude jouait à la patinoire du quartier.

Ainsi va la vie dans le Bouclier canadien.

« Sudbury, c’est probablement l’endroit le plus près de chez moi que je vais jouer », a souligné l’attaquant des Sénateurs au LNH.com cette semaine. « Je suis tellement heureux que ma famille puisse me voir à l’oeuvre, surtout ma grand-mère. Ça fait longtemps qu’elle ne m’a pas vu jouer.

« Avec tous les gens qui seront présents, ça devrait être un match amusant pour moi. C’est toujours spécial de jouer près de la maison. »

Six heures, c’est près de la maison?

« Ouais… ce l’est en quelque sorte », a lancé Giroux en riant.

Pour les jeunes amateurs de hockey du nord de l'Ontario qui espèrent devenir le prochain Claude Giroux, c'est certainement le cas. Afin de trouver des équipes à affronter, il faudra inévitablement parcourir de longues distances.

Dans les grandes villes ontariennes de l'est et du sud, comme Toronto et Ottawa, on retrouve des arénas aux quatre coins de la ville. Mais pour des communautés comme Hearst, la distance entre chaque patinoire se compte en centaines de kilomètres.

Durant son enfance, le fait de rester assis dans la voiture pendant des heures pour se rendre à un match ou à un tournoi n'était pas un problème pour le jeune Claude. C'est comme ça que ça se passait pour tous les joueurs.

« En grandissant, Kapuskasing (à 100 km) était à une heure de route et c'était probablement la communauté la plus proche où nous allions jouer, s'est-il souvenu. Ensuite, il y avait Timmins (260 km), à environ trois heures de route. Et si nous allions à des tournois, des tournois plus importants, c'était dans des endroits comme Sudbury, Thunder Bay (520 km), Toronto (1000 km).

« La route était longue! Mais pour les enfants que nous étions, nous ne considérions pas cela loin. Nous aimions ça aller sur la route et affronter d’autres villes. J’ai de très beaux souvenirs de tout ça. »

Toronto se trouve à 10 heures de route au sud de Hearst, une communauté essentiellement francophone de 5500 habitants qui se présente comme la capitale de l'orignal au Canada. En effet, à Hearst, ces grands cervidés sont plus nombreux que les humains.

C'est là que Giroux a passé les 14 premières années de sa vie avant de déménager dans la région d'Ottawa.

Obtenir du temps de glace n'a jamais été un problème, dit-il, car la patinoire locale, l'aréna Claude-Larose, disposait de deux patinoires. Sa sœur Isabelle et lui avaient même des casiers dans le sous-sol de la résidence familiale pour faire sécher leur équipement, parce qu'ils se rendaient à la patinoire presque tous les jours.

Giroux a raconté qu'il a fait ses débuts au hockey avec les Lumber Kings de Hearst, en ajoutant qu'à peu près tous les joueurs qui tentaient leur chance allaient réussir à faire partie de l'équipe en raison de la petite taille de la ville. Mais Giroux soutient qu'il a évolué avec « d'excellents joueurs ».

Quant au rêve de jouer dans la LNH un jour, les enfants comme Giroux qui cherchent de l'inspiration n'ont qu'à penser à l'homme qui a donné son nom à l'aréna local. Claude Larose, aujourd'hui âgé de 82 ans, a joué 944 matchs dans la LNH avec les Canadiens de Montréal, les North Stars du Minnesota et les Blues de Saint-Louis de 1963 à 1978. Il a récolté 483 points (226 buts, 257 passes) et a fait partie de cinq éditions des Canadiens qui ont remporté la Coupe Stanley (1965, 1966, 1968, 1971, 1973).

Aujourd'hui, des décennies après ses débuts dans le hockey mineur, c'est un Giroux de 36 ans que les jeunes qui aspirent à jouer dans la LNH prennent comme modèle. Il suffit de regarder le devant des chandails de l'équipe locale pour s'en rendre compte.

En 2017, les Lumberjacks de Hearst, qui se préparaient à faire leurs débuts dans la Ligue de hockey junior du Nord de l’Ontario, ont fait de Giroux leur logo. La caricature de son visage apposée sur les chandails visait à remercier Giroux pour son soutien financier et pour l’inspiration qu’il a été lorsqu’est venu le temps de fonder la concession.

Dans le nord de l’Ontario, on n’oublie jamais un des nôtres.

« Chaque fois qu'un gars du nord de l'Ontario est repêché, c'est toujours très spécial », a souligné Giroux, qui a été sélectionné au 22e échelon par les Flyers de Philadelphie lors du repêchage de la LNH en 2006. « En grandissant, on prêtait attention aux gars du nord de l'Ontario qui réussissaient. Par exemple, je me souviens de Steve Sullivan, qui est originaire de Timmins, lorsqu'il a fait ses débuts dans la LNH. C'était une grande nouvelle pour tout le monde là-bas. »

Aujourd'hui, c'est Giroux qui fait parler de lui. En 1182 matchs dans la LNH avec les Sénateurs, les Flyers et les Panthers de Floride, il a accumulé 1066 points (350 buts, 716 passes) et son nom fait maintenant partie de la conversation pour une place au Temple de la renommée du hockey.

C'est pourquoi ses amis et sa famille, y compris sa grand-mère Hélène, sont impatients de faire les six heures de route jusqu'à Sudbury pour le voir jouer en personne. Le match fait partie des célébrations pour la ville gagnante du concours Kraft Hockeyville 2024, Elliot Lake, qui se trouve à 175 km à l'ouest de Sudbury. Bien que cette communauté ait remporté le concours, elle n'a pas pu accueillir la rencontre parce que l'aréna n'est pas en état de recevoir un match de la LNH.

« Avec Kraft Hockeyville, j'espérais qu'on puisse un jour jouer à Hearst, a raconté Giroux. Mais Sudbury est à mi-chemin d'Ottawa. Quand j'ai vu que nous allions jouer là-bas, j'étais très emballé.

« Ce sera plaisant pour moi. Et ça va être amusant pour les gens du nord de l'Ontario ».

Surtout pour grand-maman.