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MONTRÉAL - Jerry Price n'a pas parlé à Bernard Parent depuis plus de 40 ans et lundi, les deux hommes se sont retrouvés dans le salon des anciens des Canadiens de Montréal au Centre Bell pour parler du bon vieux temps.

Assis entre les deux et portant un chapeau de cowboy, Carey, le fils de Jerry et le gardien le plus victorieux de l'histoire des Canadiens avec 321 gains, les écoute attentivement.
Jerry Price a défendu la cage des équipes de Calgary et de Portland dans la West Coast Hockey League au milieu des années 1970 et il admirait Parent. Il l'observait de loin pendant que le gardien québécois conduisait les Flyers de Philadelphie à deux titres de la Coupe Stanley en 1974 et en 1975, remportant à chacune de ces occasions le trophée Conn-Smythe remis au joueur par excellence des séries éliminatoires.
Parent a fait ses débuts dans la LNH en 1965-66 avec les Bruins de Boston, qui l'avaient recruté deux ans plus tôt afin qu'il évolue avec leur équipe junior de Niagara Falls, en Ontario. Il a disputé 608 matchs dans la LNH avec les Bruins, les Flyers, les Maple Leafs de Toronto et de nouveau les Flyers. Il a également fait un bref séjour avec la formation de Philadelphie dans l'Association mondiale de hockey en 1972-73.

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Les Flyers ont sélectionné Jerry Price au huitième tour du repêchage amateur 1978 de la LNH (126e au total) et ils l'ont invité à leur camp d'entraînement l'automne suivant. Il a alors eu l'occasion de suivre les enseignements du légendaire Jacques Plante, l'entraîneur des gardiens des Flyers qui avait remporté six fois la Coupe Stanley et sept fois le trophée Vézina.
Price se souvient que Plante l'avait pris sous son aile et que Parent, qui entreprenait la dernière année d'une carrière de 13 saisons dans la LNH couronnée par son entrée au Temple de la renommée du hockey en 1984, l'a fait se sentir comme un membre à part entière de l'équipe, et ce, même s'il était très loin dans la hiérarchie des gardiens de Flyers et même s'il n'a jamais joué dans la LNH.
« Tu étais mon héros », a lancé Jerry, toujours en admiration devant Parent, lors du deuxième entracte du match préparatoire perdu 3-0 par les Canadiens contre les Maple Leafs. « Tout ce que je faisais dans les mineures à Milwaukee et en Pennsylvanie, c'était pour essayer d'être comme toi.
« Mon surnom était "Bernie" », a poursuivi l'homme de 61 ans en riant.
Parent était de retour dans sa ville natale avec sa femme, Gini, pour assister à la cérémonie d'intronisation du Panthéon des sports du Québec de mardi. L'ancien cerbère de 74 ans sera le huitième gardien admis après, dans l'ordre chronologique, Georges Vézina, Plante, Bill Durnan, Patrick Roy, Ken Dryden, Martin Brodeur et George Hainsworth.

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Parent a grandi à côté de la maison de la sœur de Plante et il était trop nerveux pour sortir quand la légende des Canadiens allait fumer un cigare dans l'entrée.
« Je pense aux moments où je regardais jouer Jacques et les Canadiens le samedi soir avec mon père, a raconté Parent. Je pense aussi à mes années chez les midgets et au championnat de Montréal qu'on a gagné. Je pense à mes saisons à Toronto avec Plante (où j'ai joué 65 parties en 1970-71 et en 1971-72). C'est lui qui m'a appris comment agir en professionnel et qui a changé ma carrière. Puis, je pense à mon retour chez les Flyers (en 1973-74) pour gagner deux fois la Coupe Stanley.
« Il y a tellement de gens qui m'ont aidé depuis mon enfance. Je suis très reconnaissant d'avoir pu grandir à Montréal, au bon endroit au bon moment. »
Parent retrouve tranquillement la forme après avoir subi une opération au dos le 8 avril. Il s'est fait poser deux tiges de titane et six vis dans le dos lors d'une opération de sept heures pour soigner des blessures subies lorsque sa voiture a été emboutie par un camion il y a un an de cela, ce mardi. C'est arrivé à Philadelphie quand lui et sa femme, Gini, revenaient d'un match préparatoire des Flyers.

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« Ils ont sorti les vis de votre tête pour les mettre dans votre dos », a lancé Carey Price à la blague. Il avait les yeux grand ouverts quand Parent leur a montré, à lui et à son père, une de ses bagues de la Coupe Stanley.
Parent a ensuite tendu la main vers le jeune Price avec un « Tope là! » bien senti. Price a pris la main de Parent dans ses deux mains et il a répondu : « Je vais plutôt vous serrer la pince! »
Les trois hommes ont discuté de l'évolution du sport - « Ç'a beaucoup changé même depuis que j'ai commencé (en 2007-08) », a révélé Carey Price - ainsi que de la responsabilité des joueurs par rapport au sport et aux amateurs. Ils ont aussi parlé de l'importance de l'attitude autant dans les bonnes périodes que dans les moments difficiles.

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« Quand on s'amuse, on dirait que tout va mieux, a mentionné Parent. Dans la vie, quand on est fâché ou perturbé, c'est comme si le feu de circulation était rouge. Quand on se sent bien, c'est comme s'il était toujours vert. »
Parent a salué toutes les personnes qu'il a rencontrées lundi, sans exception. À l'entrée du personnel du Centre Bell, il a bavardé avec André Lemoyne, qui travaille pour les Canadiens depuis le début des années 1960 et qui a vu Parent jouer dans les rangs bantam et midget. Deux espoirs des Maple Leafs qui se réchauffaient près de leur vestiaire ont pu jeter un coup d'œil à ses bagues sans même le demander.
L'entraîneur de Toronto Mike Babcock, qui s'intéresse beaucoup à l'histoire du hockey, a accueilli Parent dans la salle des entraîneurs des Maple Leafs et l'arbitre Wes McCauley en a profité pour venir le saluer.

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Lorsque le directeur général de Toronto Kyle Dubas s'est présenté, toujours aussi élégant, Parent l'a observé quelques instants, puis il lui a demandé s'il arrivait de Hollywood. Ravi, Dubas lui a répondu : « Voudriez-vous vous joindre à nous pour toute la saison? »
« Dis-moi », a alors demandé Parent à Steve Brière, l'entraîneur des gardiens des Maple Leafs. « Pourquoi les gardiens d'aujourd'hui sont-ils presque toujours à genoux, peu importe où se trouve la rondelle? »
Brière lui a expliqué les nuances et la rapidité du jeu moderne pendant que Babcock écoutait, le sourire aux lèvres.
De retour dans le salon des anciens avec sa femme après avoir regardé la première période dans une loge du cinquième étage préparée par le propriétaire des Canadiens Geoff Molson et le président des anciens Canadiens Réjean Houle, Parent a appris que le siège dans lequel il s'était assis n'était rien de moins que celui du légendaire Jean Béliveau.
« Quelqu'un comme Jean, si digne et talentueux, a-t-il laissé tomber. Jean savait comment se faire des amis. Il était si gentil et chaleureux. Personne n'est éternel, mais il arrive qu'on croise une personne comme lui et qu'on se dise : "Mon Dieu, j'aurais voulu qu'il reste toujours avec nous." »

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Parent a ajouté qu'il ne se sentait pas en territoire ennemi à sa première visite dans cet amphithéâtre, et ce, même si ses Flyers avaient livré de bonnes batailles au Forum de Montréal contre plusieurs des anciens Canadiens honorés sur ces murs.
« On s'affrontait sur la glace, a-t-il mentionné, mais en dehors de la patinoire, on faisait tous partie de la grande famille de la LNH. On ne peut pas toucher ou voir les vibrations dans cette pièce, mais on les sent. »
Vers la fin de la soirée, Jerry et Carey Price ont pris une photo avec Parent devant le présentoir honorant les 24 conquêtes de la Coupe Stanley des Canadiens à l'extérieur de leur vestiaire.
« Tu m'as traité comme un coéquipier », a conclu Jerry Price en prenant la main de celui qui était et qui sera toujours son héros. « Merci infiniment pour ta gentillesse. Je ne l'oublierai jamais. »
Photos : Vitor Munhoz, Canadiens de Montréal, Temple de la renommée du hockey