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La décision n'avait pas tout à fait l'air de ça en apparence, mais Claude Julien et les Canadiens ont pris un risque calculé en envoyant le jeune Cayden Primeau dans la mêlée face à la grosse attaque de l'Avalanche du Colorado, jeudi.

La recrue de 20 ans n'a peut-être pas signé la victoire à son premier match dans la LNH, mais il n'a pas mal paru pour autant en cédant trois fois sur 35 lancers dans un revers de 3-2. Il y avait un danger pour son niveau de confiance en cas de contre-performance, c'est certain, mais il faut prendre des risques dans la vie!
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C'est facile à dire maintenant que le jeune a fait bonne impression, mais j'étais convaincu qu'il s'agissait de la bonne décision. L'Avalanche avait joué la veille et je crois qu'il est bénéfique de placer un jeune dans une situation d'adversité, où les projecteurs sont tournés sur lui, plutôt que de le faire dans un match sans enjeu et sans émotion.
Quand une équipe a un bon vestiaire et des joueurs unis, ç'a un effet mobilisateur sur les troupes parce que personne ne veut laisser tomber la recrue. C'est beaucoup plus facile pour un entraîneur de « protéger » un jeune attaquant ou un jeune défenseur qu'un jeune gardien, alors c'est au groupe de le faire.
C'est intimidant pour un gardien de son âge de se retrouver devant un filet de la LNH - je l'ai vécu à 18 ans - mais ce n'est pas si difficile. C'est souvent même un peu plus facile que dans le junior ou dans les rangs universitaires.
Ça peut avoir l'air drôle de dire ça à propos de la meilleure ligue au monde, mais c'est la réalité. J'en parle par expérience parce que mon baptême de feu dans la LNH a eu lieu face aux puissants Penguins de Pittsburgh en 1993-94 quand je suis venu en relève à Stéphane Fiset après une période de jeu, et ensuite à mon premier départ contre les Blackhawks de Chicago au défunt Chicago Stadium.
Le jeu est plus rapide, les tirs sont plus précis et plus puissants, mais tout le reste se déroule généralement plus rondement que dans les niveaux inférieurs. C'est l'impression que j'ai eue à mon tout premier camp professionnel avec les Nordiques de Québec. Les défenseurs sont meilleurs et l'équipe joue beaucoup mieux en territoire défensif; c'est beaucoup plus structuré.
À court terme, donc, Primeau devrait avoir un peu plus de facilité. Ensuite, le gros défi sera de garder le rythme sur une longue période - si les Canadiens décident de prolonger son séjour avec le grand club pendant que Keith Kinkaid continue de travailler sur son jeu dans la Ligue américaine.

Le Tricolore baisse pavillon 3-2 contre l'Avalanche

C'est difficile de maintenir les mêmes standards sur plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Au-delà de la constance sur la patinoire, il devra aussi garder un bon équilibre au plan mental. Dans la LNH d'aujourd'hui où une équipe doit gagner constamment pour espérer se tailler une place en séries, un gardien auxiliaire ne peut aligner les contre-performances.
C'est le gros défi qui attend le jeune Primeau, qui n'a encore que 13 matchs d'expérience chez les professionnels.
Rôle ingrat
Il est difficile de deviner les intentions du Tricolore avec Primeau. Une chose est sûre, s'ils décident de le garder à Montréal, c'est qu'il doit disputer des matchs. Ce fut exactement le même principe pour Jesperi Kotkaniemi, l'an dernier, ainsi que Nick Suzuki et Cale Fleury, cette saison. C'est indispensable pour trouver ton rythme et ensuite le conserver.
Avec un gardien no 1 comme Carey Price et la situation difficile dans laquelle l'équipe se retrouve au classement, ce sera difficile de lui faire confiance régulièrement. Les formations en difficulté vont surutiliser le no 1 pour essayer de gagner un maximum de matchs. Ç'a évidemment un impact sur le no 2.
Si Primeau obtient un départ ou deux aux deux ou trois semaines, ce sera très difficile. Et ce n'est pas seulement parce qu'il est jeune, même un gardien expérimenté aura de la difficulté à afficher de la constance en pareille situation - on l'a vu avec Kinkaid. Le rôle de gardien no 1 vient évidemment avec ses défis, mais celui d'auxiliaire en est un tout aussi ingrat.
Primeau aurait beau s'entraîner avec intensité, il ne peut simuler le feeling d'un match - pas complètement, du moins. Si tu veux jouer sans penser, tu dois avoir un synchronisme parfait et des réflexes bien aiguisés et tout ça vient naturellement à force de disputer des matchs. C'est pourquoi les premières minutes de chaque rencontre que tu joues après une longue absence sont plutôt difficiles. Ça va vite!
Le petit échantillon qu'on a vu de lui jeudi contre l'Avalanche est cependant très encourageant. Il était peut-être un peu nerveux en début de match et avait un peu de misère à contrôler la rondelle, mais j'ai bien aimé son positionnement, ses lectures de jeux et son agilité sur ses déplacements latéraux. Pour un jeune de son gabarit, c'est assez prometteur.
Il a du talent, ça saute aux yeux, et il peut jouer dans la LNH, il n'y a pas de doute. Reste à voir s'il peut le faire à compter de maintenant ou s'il aura besoin d'encore un peu de temps.