Craig Berube TOR

CALAHOO, Alberta – Si vous conduisez 30 minutes au nord-ouest du Rogers Place, domicile des Oilers d’Edmonton, vous arriverez dans le patelin de Calahoo, un minuscule point sur la carte de l’Alberta.

Selon le dernier recensement de Statistique Canada, sa population en 2021 était de 143 résidents. Et à première vue, beaucoup portent le nom de famille Berube.

« Je ne peux pas vous donner le nombre exact, mais il y a beaucoup de Berube », a lancé l’entraîneur des Maple Leafs de Toronto Craig Berube au sujet de son village natal. « Mon père a six frères et une sœur. En tout, ils ont eu 18 ou 19 enfants. Eux aussi ont eu des enfants.

« Ils habitent tous encore là. Je suis le seul qui est parti. »

Ne vous méprenez pas. L’endroit est au cœur du bastion de partisans des Oilers. Aujourd’hui âgé de 58 ans, Berube était adolescent quand les Oilers de Wayne Gretzky étaient une dynastie. Il sait ce que l’organisation signifie pour les gens de la région.

Mais quand Berube et les Maple Leafs vont accueillir le Lightning de Tampa Bay pour la deuxième édition de Prime Monday Night Hockey lundi (19 h 30 HE; TVAS, Prime, NHLN, BSSUN), plusieurs habitants de Calahoo changeront d’allégeance le temps d’une soirée.

« Il y aura toujours des partisans d’Edmonton ici, mais ses amis et sa famille sont derrière lui et Toronto », a assuré Roger Berube, le père de Craig.

L’objectif de Berube : que ses joueurs et les partisans de Toronto soient eux aussi derrière lui dans la quête d’un premier championnat en 57 ans.

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Le 2 janvier 1992, les Maple Leafs et les Flames de Calgary ont procédé à un échange majeur. Doug Gilmour, Ric Nattress, Jamie Macoun, Kent Manderville et Rick Wamsley ont pris la direction de Toronto en retour de Berube, Gary Leeman, Alexander Godynyuk, Michel Petit et Jeff Reese. À ce jour, il s’agit encore de la plus grosse transaction de l’histoire de la LNH en termes de joueurs impliqués (10).

En 1054 matchs en carrière dans la LNH, Berube a été beaucoup plus un pugiliste qu’un producteur de points, accumulant le septième plus haut total de minutes de pénalité dans l’histoire de la Ligue (3149). Quarante de ses matchs ont été joués avec les Maple Leafs lors de la saison 1991-92, un passage qui lui a fait réaliser à quel point les joueurs de Toronto sont constamment sous les projecteurs.

Malgré ce court passage, Berube n’a pas été oublié.

Il l’a constaté quelques semaines après avoir été embauché par les Maple Leafs le 17 mai, huit jours après le congédiement de Sheldon Keefe. Lors d’un tête-à-tête avec l’attaquant Mitch Marner dans un café à moitié vide de Toronto, un partisan a pris une photo d’eux et l’a publiée sur les médias sociaux. C’est devenu viral... parce que c’est Toronto, après tout.

Questionné sur cet échange avec Marner et la réaction des partisans, Berube a répondu qu’il ignore ces distractions externes. Quant à Marner, qui a fait l’objet de critiques après que les Maple Leafs eurent été éliminés en première ronde par les Bruins de Boston, Berube a répliqué qu’il avait hâte de le diriger.

Simple. Direct. C’est de cette façon que Berube jouait et c’est ce qui le caractérise comme entraîneur, dans sa façon de communiquer.

« Ses attentes sont claires », a dit le défenseur de Toronto Morgan Rielly.

Ce que Berube veut, c’est du jeu nord-sud simple. Il n’y a pas de point boni pour faire dans la dentelle. S’il ne veut pas réprimer la créativité de ses joueurs de talent comme Marner, Auston Matthews et William Nylander, la formule de base est simple : un échec avant solide, des mises en échec et du jeu défensif serré.

C’est un plan de match qui l’a bien servi durant sa carrière d’entraîneur. Il compilait une fiche de 281-190-72 en 543 matchs de saison régulière derrière le banc des Flyers de Philadelphie et des Blues de St. Louis avant d’obtenir le poste à Toronto. En 2019, il a conduit les Blues à la Coupe Stanley.

L’échantillon est mince depuis qu’il est avec les Maple Leafs, mais il y a des sources d’optimisme, surtout sur le plan défensif.

En cinq matchs cette saison, les Maple Leafs ont un dossier de 3-2-0. Ils se sont inclinés 4-1 contre les Rangers de New York au Scotiabank Arena samedi, mais le duel a été serré jusqu’à la toute fin, quand les Rangers ont inscrit deux buts dans un filet désert.

L’une des statistiques qui sautent aux yeux jusqu’à maintenant cette saison : les Maple Leafs ont accordé 11 buts en cinq rencontres, incluant deux buts dans un filet désert.

« Il faut du temps avant d’assimiler un nouveau système de jeu, mais nous y arrivons tranquillement », a noté Rielly.

Berube est d’accord.

« L’éthique de travail de cette équipe est excellente », a-t-il assuré.

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Les Maple Leafs vont jouer quatre matchs cette semaine. L’un d’entre eux est encerclé sur le calendrier de Berube.

Ils accueilleront les Blues jeudi. Ce sera la première fois que Berube affronte son ancienne équipe depuis qu’il a été remercié le 12 décembre 2023.

Réputé pour être un dur à cuire lors de ses années comme joueur, Berube était émotif quand on l’a questionné sur l’expérience qu’il s’apprête à vivre.

« Ce sera génial », a affirmé Berube, qui a dirigé St. Louis de 2018 à 2023. « J’ai eu de belles années là-bas. Je suis devenu très proche de plusieurs joueurs, membres de la direction et gens de St. Louis. Je le serai toujours.

« Quant aux joueurs, j’ai dirigé Brayden Schenn quand il était encore un jeune joueur à Philadelphie. J’ai longtemps dirigé Robert Thomas et Jordan Binnington. Je tiens à ces gars-là et j’ai à cœur l’organisation des Blues.

« Mais je suis passé à autre chose. Je suis avec les Leafs maintenant. »

Schenn n’a pas oublié ce que Berube a fait pour lui.

« Ça fait en sorte que je suis Toronto un peu plus attentivement », a-t-il dit samedi. « “Chief” a été tellement bon pour moi durant ma carrière. Il m’a donné la chance de jouer dans cette ligue pendant longtemps. Je lui dois beaucoup.

« Tu sais à quoi t’en tenir avec lui. Chief ne passe pas par quatre chemins. J’ai toujours dit qu’il est le premier qui va te critiquer parce que tu as mal joué la veille. Mais après 20 minutes, il va te demander comment tu te portes. »

Après tout, Schenn, Thomas et Binnington font partie des joueurs qui ont aidé les Blues à gagner la Coupe en 2019. Berube les a guidés au plus haut sommet. L’union entre Berube et St. Louis a permis à l’entraîneur d’apporter la Coupe à Calahoo, le 2 juillet 2019, où il l’a partagée avec les gens de sa communauté, qui ont une fois de plus changé d’allégeance le temps d'une journée.

Berube espère maintenant qu’il pourra revivre ce moment, cette fois comme entraîneur des Maple Leafs.

*Avec la contribution du correspondant indépendant NHL.com Lou Korac.

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