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SAN JOSE — S'il existe un surnom parfait pour un personnage plus grand que nature, ce serait « Jumbo ».

« Jumbo » Joe Thornton l'est certainement, et même plus.

C'est un point que le maire de San Jose Matt Mahan et le président des Sharks de San Jose Jonathan Becher tentaient de faire valoir, jeudi, pendant une cérémonie à l'intérieur de la prestigieuse rotonde de l'hôtel de ville de San Jose, où les élus municipaux ont officiellement déclaré que le samedi 23 novembre allait être la « Journée Joe Thornton ». C'est ce jour-là que le chandail numéro 19 porté par l'ancien attaquant des Sharks de San Jose sera retiré et hissé au plafond du SAP Center avant le match contre les Sabres de Buffalo (20 h HE; NBCSCA, MSG-B).

Une centaine de personnes s'étaient rassemblées à l'hôtel de ville pour assister à la proclamation lorsqu'on leur a dit qu'on avait demandé à certains des anciens coéquipiers de décrire en un seul mot. Certains d'entre eux ont répondu « icône » et « légendaire ». « Barbe », en référence à ses fameux poils faciaux poivre et sel qui s'étendent bien en dessous de son cou, est revenu souvent.

Puis le moment est venu pour Thornton de monter sur le podium et d'offrir sa propre analyse.

« J'aurais probablement utilisé le mot "sexy", monsieur le maire », a-t-il lancé, provoquant des éclats de rire dans la chambre.

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Il s'agissait, sans surprise, des premiers commentaires de Thornton devant le public. Voilà Joe Thornton en quelques mots. Amusant. Brut. Sans filtre. Spontané. Aucun moment n'est trop imposant pour lui. Il a conservé son coeur d'enfant, même dans un corps d'homme de 45 ans. Ses paroles, comme toujours, venaient du cœur et non d'un discours écrit sur une feuille de papier.

« On va changer cette célébration pour qu'elle devienne le "Week-end Joe Thornton", au fait », a-t-il déclaré quelques instants plus tard, suscitant d'autres applaudissements.

En réalité, cette relation d'amour entre le joueur et sa communauté persiste depuis presque deux décennies, soit à partir du moment où il a été échangé aux Sharks par les Bruins de Boston le 30 novembre 2005.

Ayant porté le chandail des Sharks entre 2005 et 2020, Thornton est le meneur de l'histoire de la concession au chapitre des passes (804), des points par match (0,96), des points en avantage numérique (402) et du différentiel (+161). Il se classe également deuxième pour les points (1055), troisième pour les matchs joués (1104) et quatrième pour les buts (251).

Ce faisant, lui et son grand ami Patrick Marleau, le meneur des Sharks pour les matchs joués (1607), ont aidé à transformer une région mieux connue comme l'un des pôles les plus importants de haute technologie en un marché où le hockey était adulé, un endroit où les équipes visiteuses étaient accueillies par l'une des ambiances les plus bruyantes dans la LNH dans un aréna surnommé « The Shark Tank ».

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Durant les 15 saisons de Thornton à San Jose, les Sharks ont présenté la meilleure fiche dans la LNH en saison régulière (659-376-125), ils ont atteint les séries éliminatoires de la Coupe Stanley à 13 reprises, ils ont participé à la finale de l'Association de l'Ouest quatre fois et ils ont atteint la finale de la Coupe Stanley en 2016, où ils ont été vaincus par Sidney Crosby et les Penguins de Pittsburgh en six rencontres. Il s'agit de la seule ombre au tableau de l'illustre carrière de Thornton : pas de conquête de la Coupe Stanley.

« Nous étions tous dévastés quand nous avons perdu face aux Penguins », a affirmé l'entraîneur des Stars de Dallas Peter DeBoer, qui était l'entraîneur des Sharks à l'époque. « Mais je peux vous dire que chaque gars dans le vestiaire était encore plus dévasté pour Joe. C'est le genre d'amour que ses coéquipiers avaient envers lui. »

C'est le même genre d'amour que cette communauté continue de lui porter.

« On ne peut pas parler de San Jose sans mentionner les Sharks et Joe. Tu as tout donné aux deux », a déclaré le maire Mahan en regardant au premier rang, où étaient assis l'épouse de Thornton, Tabea, sa fille, Ayla, son fils, River, et ses parents, Wayne et Mary.

« Ça signifie tout pour moi d'avoir maman et papa ici, ainsi que ma femme et mes enfants. Ça veut tout dire, a dit Thornton. C'est très spécial de partager ces moments-ci avec eux, parce qu'en tant que famille, vous vivez beaucoup d'expérience dans le monde du hockey. J'ai téléphoné à ma mère et mon père après chaque match. »

C'est cette humilité qui a amené San Jose à l'accueillir chaleureusement pendant toutes ces années.

« Je n'aurais jamais imaginé que je serais honoré avec ma propre journée, a avoué Thornton. Mais nous y voilà. »

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La famille est d'une importance primordiale pour Wayne et Mary. Wayne a expliqué que son propre père « était alcoolique et qu'il n'était pas très présent ». Ils se sont assurés que ce ne soit pas le cas pour leurs trois enfants, Joe et John, qui a trois ans de plus que Joe, et Alex, qui a huit ans de plus.

À cette fin, la maison de Wayne et Mary est devenue un véritable sanctuaire pour leurs enfants, rempli des trophées et de chandails de hockey. Au sous-sol, il y a une table de "shuffleboard" fabriquée sur mesure aux couleurs des Bruins en l'honneur de Joe, qui a été sélectionné par Boston avec le premier choix au repêchage 1997 de la LNH. La table est agrémentée par des autographes authentiques de membres du Temple de la renommée du hockey, comme Bobby Orr et Phil Esposito. Des dizaines de chandails de la LNH et du hockey junior de Joe se trouvent partout, sans parler des articles de journaux à son sujet qui ont été écrits au cours des trois dernières décennies. Il y a même un Chia Pet « Jumbo » Joe Thornton, qui a provoqué les éclats de rire de son ancien coéquipier des Maple Leafs William Nylander dans le vestiaire de Toronto plus tôt cette semaine quand il l'a vu dans une photo.

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« Nous sommes si fiers de lui, de tous nos enfants », a déclaré Wayne.

À un tel point que Wayne et Mary eux-mêmes sont devenus des légendes dans le monde du hockey parce qu'ils se rendaient en voiture partout en Amérique du Nord pour assister aux matchs de Joe. Au lieu de prendre l'avion ou de demeurer à l'hôtel, ils montaient dans leur camionnette et se rendaient d'une ville à l'autre, dormant sur la banquette arrière dans le cadre de leurs aventures.

« Je me souviens d'une fois où quelqu'un qui travaillait avec les Bruins a découvert que je dormais dans la camionnette dans le stationnement du TD Garden, a raconté Wayne. Il m'a dit immédiatement, "Tu peux venir rester chez moi." »

La personne qui a offert l'invitation. Le légendaire Bobby Orr.

« Je lui ai poliment dit, "Merci, mais non", a dit Wayne en rigolant. Nous aimons ce que nous faisions, l'expérience, l'aventure. »

Imaginez ça. Un Thornton qui embrasse les aventures de la vie?

Tel père, tel fils.

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Les histoires et les aventures de Thornton sont légendaires, selon DeBoer.

On peut dire la même chose de son impact durable sur le monde du hockey, passé et présent.

« Je ne pourrais pas être plus heureux pour lui et sa famille avec toute la reconnaissance qu'il reçoit, a déclaré DeBoer. Tu ne rencontreras jamais un meilleur coéquipier ou une meilleure personne. Il est l'une de mes personnes favorites.

« Mais ce n'est pas tout. Nous avons besoin de figures divertissantes dans le hockey. Notre sport en manque, à mon avis. Et c'est difficile de trouver une plus grande personnalité que Jumbo. »

DeBoer est bien placé pour le savoir. Après tout, il a croisé le chemin de Thornton pour la première fois il y a presque trois décennies.

« Je me rappelle avoir dirigé Joe et Patrick Marleau comme entraîneur du Canada au tournoi des moins de 18 ans en 1995-96, a-t-il raconté. Nous avions un jour de congé, et l'équipe est allée faire du canoë sur un lac local. Le lendemain, nous avons reçu un appel qui nous informait que le canoë que Joe occupait était complètement abîmé. Qui sait comment ça s'est produit? »

DeBoer a ri.

« C'est Joe, a-t-il dit. Jamais ennuyeux. Par exemple, je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui aimait plus être nu que lui. »

Pardon?

« Voici un exemple, a poursuivi DeBoer. Je me souviens que pendant la finale de la Coupe Stanley en 2016, lui et Brent Burns se promenaient à Pittsburgh torse nu, comme s'ils n'avaient pas le moindre souci. Et regardez tous les entretiens qu'il a passés sans chemise. »

Aujourd'hui, Nylander s'adresse souvent aux médias sans chemise. L'attaquant des Maple Leafs a admis cette semaine qu'il a adopté cette habitude de Thornton.

« Bien sûr qu'il le fait », a répliqué Thornton à la blague à propos de l'aveu de Nylander. « Pourquoi ne le ferait-il pas quand il est sexy comme moi? »

À cet égard, quand Thornton a annoncé sa retraite l'année dernière, il l'a fait par le biais d'une vidéo dans laquelle il portait un chapeau de soleil et était torse nu.

Bien sûr. Pourquoi s'attendre à autre chose?

Thornton, Nylander, Auston Matthews, le défenseur Rasmus Sandin et Mac Hollowell ont tous vécu ensemble dans la même maison pendant plusieurs semaines quand ils sont tous revenus au Canada avant la saison 2021, qui devait commencer le 16 janvier. En raison des restrictions de voyage liées à la pandémie de COVID-19, la Ligue a temporairement réorganisé sa structure, créant une section toute canadienne. Thornton s'était entendu avec les Maple Leafs à titre de joueur autonome sans compensation le 16 octobre 2020.

« Il aimait simplement la vie, a noté Nylander. Il avait environ 40 ans à l'époque, mais il était véritablement un jeune homme.

« Ce n'était que des jeux sans cesse. La maison comprenait une patinoire, un terrain de basket, un terrain de badminton. Il y avait tellement de choses à faire. Et nous ne restions jamais assis. Le moment où nous nous arrêtions, il nous disait, "Faisons ceci, faisons cela." »

À une occasion en particulier, Matthews a raconté que Thornton portait des patins dans la maison, avec les lames couvertes de ruban, afin de les "casser".

« Qu'est-ce que je peux dire?, a répliqué Thornton quand on lui a rappelé l'incident. J'aime le hockey. Vous le savez. »

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Quelle sera la prochaine aventure de Joe Thornton?

Becher a confirmé que la porte était toujours ouverte pour lui s’il veut occuper un poste dans l’organisation des Sharks.

Mais pour l’instant, cette proposition n’est pas dans les plans du principal intéressé.

« J’aide l’équipe des moins de 12 ans de la structure de développement des Sharks. C’est suffisant pour moi présentement », a-t-il dit.

Thornton Celebrini 2024 Upper Deck NHL Draft - First Round

Thornton est également le mentor de Macklin Celebrini, premier choix au total du dernier repêchage de la LNH. Celebrini vit chez les Thornton pour sa saison recrue et il apprécie l’expérience.

« Je suis jaloux », a avoué Matthews.

Le capitaine des Maple Leafs a raison de l’être, si on en croit Celebrini.

« L’expérience est incroyable. »

Thornton acquiesce.

« Mes enfants adorent ça, a-t-il souligné. River et lui jouent souvent au hockey dans le stationnement. »

L’influence de Thornton est indéniable, même loin des patinoires.

« Son enthousiasme est contagieux », a vanté le directeur général des Sharks, Mike Grier.

« C’est l’une des nombreuses qualités qui le rendent spécial et qui rendront cette cérémonie spéciale. »

Jumbo Joe fera ce qu’il a toujours su faire : apposer son sourire et sa joie de vivre sur chaque journée.

Ce week-end, ce seront ses amis, sa famille, ses anciens coéquipiers, la planète hockey et le reste de la communauté qui lui rendront la pareille.

« Je risque de pleurer beaucoup, a-t-il averti. Mais je risque aussi de rire souvent. »

Comme seul Jumbo Joe peut le faire.