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La cérémonie d’intronisation du Temple de la renommée du hockey 2024 aura lieu lundi. La cuvée de cette année inclut Pavel Datsyuk, Shea Weber, Jeremy Roenick, Natalie Darwitz, Krissy Wendell-Pohl, Colin Campbell et David Poile. Aujourd’hui, le chroniqueur NHL.com Dave Stubbs dresse le portrait de Weber.

Le défenseur Shea Weber sera intronisé au Temple de la renommée lundi, dès sa première année d’admissibilité, au terme d’une carrière qui a été marquée par son leadership exemplaire, sa feuille de route de champion, son puissant tir frappé et son style robuste.

Il était aussi reconnu pour son économie de parole, ses actions parlant toujours plus fort que ses mots. Il est donc fort peu probable qu’il mentionne l’anecdote suivante dans son discours d’intronisation.

Alors faisons le pour lui, à partir de ses propres souvenirs.

Weber était capitaine des Predators de Nashville lorsque lui et ses coéquipiers sont arrivés à leur hôtel de Tampa au petit matin après avoir disputé un match la veille.

« Il s’agissait surtout d’une réplique à un autre coup pendable, parce que Sid est celui qui avait commencé », s’est remémoré Weber en riant, alors qu’il parlait du capitaine des Penguins de Pittsburgh Sidney Crosby. « Nous sommes arrivés tard à Tampa, et tout ce que je voulais, c’était aller me coucher. J’ai ouvert la porte, et je me suis demandé ce qui se passait. »

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Weber et Crosby ont remporté la médaille d’or aux Jeux olympiques pour le Canada en 2010 et 2014, de même que la Coupe du monde de hockey en 2016, et les deux hommes se sont côtoyés à de nombreuses reprises au Match des étoiles. Une amitié qui est née dans les rangs juniors – Weber à Kelowna, Crosby à Rimouski – se manifestait dans une chambre d’hôtel de Tampa.

Crosby et le maître incontesté des coups pendables Marc-André Fleury (Weber allait apprendre plus tard que le gardien avait aussi été impliqué) se trouvaient en ville avec les Penguins, et devaient résider au même hôtel. Les deux hommes ont trouvé le moyen de mettre la main sur la liste des chambres attribuées aux joueurs des Predators, se sont procuré une clé, et ont préparé la chambre de Weber pour son arrivée.

« Ils avaient mis la chambre sens dessus dessous, a expliqué Weber dans un éclat de rire. Le matelas avait été renversé, il y avait du papier de toilette partout. C’était assez drôle quand j’y repense aujourd’hui.

« Je me suis dirigé vers l’aréna le lendemain matin, là où les Penguins s’entraînaient, et j’ai placé un peu de gomme à mâcher dans les gants de Sid et de la Vaseline sur son casque, juste pour qu’il comprenne qu’il ne voulait pas vraiment me déclarer la guerre. Il n’a rien dit sur le moment, et je me suis rappelé que Sid était très superstitieux et très protecteur de son équipement. Je pensais que j’avais fait quelque chose de grave. Il aura fallu plusieurs années pour en discuter, et Sid a bien ri.

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« Est-ce que c’est terminé? », s’est demandé Weber à voix haute, avec une pointe d’espièglerie dans la voix. « Je ne sais pas… peut-être que quelque chose se prépare. »

Un jour, Crosby va assurément rejoindre Weber au Temple de la renommée, et les deux vieux amis seront à nouveau réunis. Lundi, comme Crosby se trouvera à Dallas pour y affronter les Stars et que Weber sera à Toronto pour son intronisation, on peut présumer que les gants, les casques et les chambres d’hôtel seront en sécurité.

Weber sera honoré pour son impressionnante carrière, à laquelle il ne manque qu’un championnat de la Coupe Stanley.

L’athlète de 39 ans natif de Sicamous, en Colombie-Britannique, a disputé 1038 matchs entre 2005 et 2021, soit jusqu’à ce que sa charpente de 6 pieds 4 pouces et 230 livres ne puisse plus endurer l’usure causée par son style de jeu et les nombreuses blessures.

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Sa fiche montre 763 matchs de saison régulière avec les Predators entre 2005 et 2016, puis 275 autres avec les Canadiens de Montréal au cours de ses cinq dernières saisons. Il a ajouté 97 parties des séries éliminatoires de la Coupe Stanley, dont 22 pendant le parcours des Canadiens jusqu’en finale en 2021.

Weber a quitté la patinoire pour la dernière fois après le match du 7 juillet 2021 au Amalie Arena de Tampa, où le Lightning venait de vaincre les Canadiens dans le cinquième match de la finale.

Échangé aux Golden Knights de Vegas le 16 juin 2022, uniquement pour la gestion du plafond salarial, Weber est ensuite passé aux Coyotes de l’Arizona le 22 février 2023, pour ultimement devenir membre du Club de hockey de l’Utah quand l’équipe a été relocalisée en vue de la saison 2024-25.

Les deux dernières années de son contrat de 14 ans sont la propriété de l’Utah, même s’il est virtuellement certain que sa carrière de joueur est terminée. Ce qui lui reste à déterminer, c’est le rôle qu’il pourrait jouer pour la plus récente équipe de la ligue.

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Weber a remporté l’or olympique avec le Canada en 2010 et 2014, après avoir remporté le Championnat mondial junior en 2005 et le Championnat du monde en 2007 alors qu’il représentait son pays.

Il a été un élément essentiel du triomphe du Canada à la Coupe du monde de hockey en 2016. Il a remporté la Coupe Memorial en 2004 avec Kelowna, et a remporté le championnat de la WHL à deux reprises. À trois occasions il a terminé parmi les finalistes pour le trophée Norris remis au meilleur défenseur de la LNH, et a terminé en deuxième place deux fois, s’inclinant par 9 et 12 votes.

En 2016 alors qu’il évoluait pour les Predators, il a reçu le trophée Mark Messier pour le leadership, remis depuis 2007 au joueur qui exerce un important leadership sur la glace comme en dehors tout en jouant un rôle important dans sa communauté afin de faire rayonner le hockey.

Weber a amassé 589 points en saison régulière dans la LNH (224 buts, 365 passes) en 1038 matchs. Depuis que ces catégories statistiques sont compilées, il occupe le sixième rang parmi les défenseurs avec 2112 mises en échec, son temps de glace moyen de 24:04 par match lui vaut le 13e échelon, et ses 1691 tirs bloqués le 23e rang. À ses quatre participations à l’épreuve du tir le plus puissant de la LNH au cours du Week-end des étoiles, en 2015, 2016, 2017 et 2020, il a gagné.

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« Si on résume ma carrière de la sorte, à partir de mon hockey mineur, puis dans les rangs juniors et tout le reste… c’est presque difficile à croire », a confié Weber à LNH.com dans les jours qui ont précédé son intronisation. « Tout le monde dit qu’ils vont regarder les choses avec plus de perspective lorsque leur carrière sera terminée. Quand on joue, on ne le réalise pas. Je suis encore en train de songer aux moments et aux souvenirs que j’ai emmagasinés, mais jusqu’au moment où je vais voir le papier ou que j’entende quelqu’un me le confirmer, je ne le réaliserai pas pleinement. »

La nouvelle de son intronisation au Temple de la renommée a en effet généré peu de réaction de la part de Weber lorsque les membres de la cuvée 2024 ont reçu un appel de la part du Temple le 25 juin afin de leur annoncer la nouvelle quelques heures avant l’annonce officielle.

Alors qu’il se trouvait sur le vert du neuvième trou dans un tournoi de golf, Weber a ignoré deux appels du Temple de la renommée, puisqu’il ne reconnaissait pas le numéro qui l’appelait. Le président Lanny McDonald et le responsable du comité de sélection Mike Gartner l’ont finalement rejoint alors qu’il approchait du 10e départ. L’annonce qu’ils ont finalement réussi à lui faire l’a poussé à se mettre à genoux.

Weber s’attend à avoir les genoux tremblants à nouveau lundi au Brookfield Place de Toronto, où il va célébrer en compagnie de son épouse, Bailey, leurs enfants Beckett, 10 ans, Kenley, 8 ans, et Maddix, 6 ans, son père, James, ainsi que des membres de sa famille et des amis.

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Il est demandé aux nouveaux intronisés de garder leur discours qu’ils vont réciter lors de l’événement télévisé entre cinq et sept minutes. Weber, qui n’est pas du genre à éterniser ses apparitions publiques, en parle en riant.

« Je ne pense pas qu’ils doivent s’inquiéter de me voir dépasser la limite, a-t-il affirmé. J’espère ne pas oublier quelqu’un. Il y a tellement de personnes qui ont eu une incidence sur ma carrière, et je leur en suis tous reconnaissant. C’est ma chance de souligner la contribution de ces gens et de souligner à quel point j’ai apprécié qu’ils fassent partie de mon histoire. »

La carrière de Weber s’est amorcée dans le programme de hockey mineur de la minuscule ville de Sicamous, où résident seulement 2613 personnes selon le recensement national de 2021, et qui est située à environ 500 kilomètres au nord-est de Vancouver. Il a par la suite visité les plus grands arénas de l’Amérique du Nord et d’ailleurs, d’abord comme joueur amateur puis comme professionnel.

Il a disputé son 1000e match dans la LNH le 2 février 2021, cinq mois avant d’enfiler ses patins pour la dernière fois de sa carrière dans le match no 5 de la finale de la Coupe Stanley avec les Canadiens, et il a eu depuis le temps de réfléchir à sa vie dans le hockey.

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« Quand j’étais enfant, je rêvais de jouer dans la LNH, a déclaré Weber. Je pensais que ce rêve allait se réaliser, je l’imaginais. C’est réalistement beaucoup plus difficile que les gens le réalisent, c’est difficile à faire, alors le simple fait d’accéder à la LNH était très spécial. D’avoir pu y évoluer pendant aussi longtemps, et de connaître une carrière avec autant de matchs joués est quelque chose que je n’aurais jamais imaginé. C’est plutôt surréel. »

Maintenant, avec son intronisation au Temple de la renommée en poche, Weber songe davantage à ses racines qu’à l’un de ses exploits en particulier dans le hockey. Les formations réduites de Sicamous et de son Association de hockey mineur ont fait en sorte qu’il a bénéficié de beaucoup de temps de glace.

« C’est assez incroyable de venir d’une toute petite ville comme je l’ai fait, avec la communauté que nous avions, les joueurs avec qui j’ai grandi et joué, s’est remémoré Weber. Mes parents ont été le facteur le plus important dans tout ce que j’ai fait, que ce soit le hockey, le baseball, peu importe le sport ou l’emploi que j’aurais occupé si ça n’avait pas fonctionné pour moi au hockey. »

Weber a bâti la majeure partie de son éthique de travail en observant son père, qui travaillait dans une scierie. Sa mère, Tracy, a été le phare de la famille jusqu’à ce qu’elle soit emportée par le cancer le 11 août 2010, James Weber et ses fils Shea et Brandon, qui est deux ans plus jeune que Shea, se trouvaient à son chevet lorsqu’elle est décédée.

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« Mes parents ont été ceux qui m’ont montré à travailler dur, à être une bonne personne d’abord, et pas seulement un joueur de hockey, a expliqué Weber. Il fallait d’abord et avant tout faire les bonnes choses et être une bonne personne. Ils m’ont appris que si tu travailles fort, tu vas être récompensé. »

Tracy Weber se trouvait avec son fils à Nashville lorsque le directeur général des Predators David Poile l’a sélectionné au deuxième tour (49e au total) du repêchage 2003. Avec le tout premier choix, les Penguins ont sélectionné Fleury, qui allait plus de dix ans plus tard saccager sa chambre d’hôtel à Tampa.

Pendant plus de 11 ans, Weber a grandi en tant que joueur et en tant qu’homme à Nashville, et il a été louangé par l’organisation ses coéquipiers et les partisans. Poile, le premier DG des Predators qui a occupé ce poste de 1997 jusqu’à sa retraite en 2023, va faire son entrée lui aussi au Temple de la renommée avec la cuvée 2024.

« Nashville m’a repêché, a vu quelque chose en moi alors que j’étais un jeune gamin, et ils m’ont donné la chance de jouer, a lancé Weber. Je connais plusieurs joueurs qui ont été repêchés, mais qui n’ont pas eu cette chance. Il faut obtenir une occasion, et je suis très reconnaissant envers David Poile et les Predators pour me l’avoir offerte. »

Le tir frappé de Weber – chronométré en moyenne à 106,5 miles à l’heure à ses quatre victoires au tir le plus puissant du concours d’habiletés – allait rapidement être craint de ses adversaires et de ses coéquipiers qui devaient voiler la vue du gardien. Quelques-uns ont subi des fractures après avoir été atteints par l’un de ses boulets de canon.

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« Je me tiendrais devant l’un de mes tirs, a affirmé Weber en riant. Je me suis tenu devant les tirs de [Zdeno] Chara et [Sheldon] Souray, alors je pense que je le ferais. Il s’agit d’un élément du jeu dont je savais que je devais m’acquitter.

« Je respecte tout adversaire qui met son corps en jeu et qui bloque des tirs. Même chose pour mes coéquipiers qui allaient se poster devant le filet, qui ont payé le prix, et que j’ai atteints de nombreuses rondelles. Je n’éprouve que du respect pour les gars qui font ça.

« Ils sont prêts à faire tout ce qui doit être fait afin d’aider l’équipe à gagner. Ce sont des joueurs avec qui il est possible de gagner, des gars qui font des choses qui ne sont pas des jeux de finesse ou des jeux spectaculaires, mais qui font leur travail afin d’aider leur équipe. »

Weber a été nommé le cinquième capitaine des Predators le 8 juillet 2010. Il regardait la télévision chez lui en Colombie-Britannique lorsqu’il a reçu un appel de Poile et de son entraîneur de l’époque Barry Trotz.

« Je n’avais pas été capitaine depuis mon hockey mineur, a-t-il mentionné. J’ai porté une lettre sur mon chandail à Kelowna pendant deux ans, un “A”. J’étais ravi, probablement en état de choc, lorsque David et Barry m’ont appelé. Dans mon esprit, j’étais encore un peu jeune (24 ans) pour être capitaine.

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« Je savais que j’allais devoir travailler dur, mais j’étais enthousiaste à l’idée de relever ce défi, de tenter de pousser cette équipe à connaître du succès et à bâtir une fondation qui allait servir de base aux années à venir. »

Il a porté le “C” pendant six saisons, jusqu’à cette transaction qui a pris le monde du hockey par surprise le 29 juin 2016, alors qu’il a été échangé aux Canadiens de Montréal en retour de l’un des favoris de la foule, le défenseur P.K. Subban.

« Si je suis parfaitement honnête, il s’agit de l’une des journées les plus tristes de ma carrière, a avoué Weber. L’équipe qui m’avait repêché, qui m’avait nommé capitaine. […] J’ai investi tout mon cœur dans cette équipe pendant mes 11 années là-bas, j’ai fait tout ce que je pouvais pour aider l’équipe à gagner. Mon premier réflexe à la suite de cette transaction a été de me dire que l’équipe ne voulait plus de moi, qu’elle me foutait à la porte après tout ce que j’avais fait pour elle.

« Mais à mesure que la journée progressait, plus je réalisais que j’allais obtenir une autre occasion ailleurs, dans une ville fantastique comme Montréal, avec toute son histoire et toutes ses conquêtes de la Coupe Stanley (24). Faire la même chose pour cette organisation allait être un honneur et devenir mon objectif. En parlant avec les gens de leur (Canadiens) côté, je suis devenu vraiment enthousiaste et excité d’avoir la chance de me joindre à une nouvelle équipe et d’aider leur cause, de l’aider à atteindre le prochain niveau. »

Il a rapidement compris qu’il allait évoluer dans un marché de hockey très différent. Avant sa troisième saison avec l’équipe, les Canadiens ont fait de lui le 30e capitaine de leur histoire, et il a porté le “C” jusqu’à son dernier match en carrière.

« Montréal a assurément été différent de Nashville, a reconnu Weber. Nous sommes constamment sous le microscope. […] Lorsque les Predators jouaient à Montréal ou Toronto, les vestiaires étaient beaucoup plus remplis que nous disputions nos matchs à Nashville, alors qu’il n’y avait qu’un ou deux journalistes après un match. J’ai absolument eu besoin d’une période d’ajustement.

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« Mais du côté de l’équipe, c’était tellement un grand honneur. De porter le “C” dans une ville comme Montréal avec toute l’histoire de l’équipe, avec tous les anciens capitaines qui m’avaient précédé, les noms que je pouvais voir suspendus dans le vestiaire, c’est difficile de décrire ce que ça voulait dire pour moi.

« J’ai été nommé capitaine pour une raison. Je n’ai rien changé à mon approche. Si on nous confie cette responsabilité, c’est qu’on fait de toute évidence quelque chose qui reflète notre leadership, alors il faut continuer à respecter notre morale et nos valeurs, continuer à travailler de la même manière pour bâtir la fondation de notre noyau. »

Weber se souvient de tout ça aujourd’hui, et il va tenter de le verbaliser en sept – ou probablement moins – minutes lorsqu’il sera intronisé avec la cuvée 2024. Ce sont les partisans, affirme-t-il, qui ont rendu son parcours si spécial, et ils vont occuper une place unique dans son cœur pour toujours.

« Je ne pourrai jamais suffisamment remercier les partisans de Nashville et de Montréal, a-t-il conclu. Le soutien qu’ils m’ont démontré tout au long de ma carrière, alors que je suis arrivé à Nashville en tant que tout jeune homme – je n’avais que 20 ou 21 ans – qui grandissait encore, et qui a pu appeler cette ville mon chez-moi pendant 11 ans. Ils m’ont accueilli dans leur communauté, et il s’agit d’une ville fantastique que j’adore.

« Il y a ensuite eu les partisans de Montréal. Leur passion ne se compare à absolument rien dans le monde du sport. Avec l’accueil qu’ils m’ont réservé après la transaction, la manière dont ils m’ont fait sentir à l’aise, les encouragements, notre parcours en séries, je ne peux en dire assez sur les souvenirs que je garde de cette ville et des bons moments que j’y ai passés. »