GeorgievJarryThibaultLNH

Choix de première ronde des Nordiques de Québec au repêchage de 1993, Jocelyn Thibault a disputé 586 matchs au cours de sa carrière de 15 saisons dans la LNH. Il a porté l'uniforme des Nordiques, de l'Avalanche du Colorado, des Canadiens de Montréal, des Blackhawks de Chicago, des Penguins de Pittsburgh et des Sabres de Buffalo, signant 238 victoires. Il a été entraîneur des gardiens de l'Avalanche pendant deux saisons et il est aujourd’hui actionnaire du Phoenix de Sherbrooke dans la LHJMQ. Il a accepté de collaborer avec l'équipe de LNH.com pour traiter des dossiers chauds devant les 32 filets de la Ligue.

La Coupe Stanley ne se gagne assurément pas au mois d’octobre, mais les équipes qui aspirent aux grands honneurs souhaitent toutes amorcer la saison du bon pied. C’est toutefois difficile d’y arriver lorsque ton gardien ne te donne pas une chance de gagner, comme c’est le cas pour Alexandar Georgiev et l’Avalanche du Colorado en ce moment.

Les statistiques de Georgiev sont tout simplement catastrophiques. En cinq départs, il a conservé une fiche de 1-3-0, une moyenne de buts alloués de 4,99 et un pourcentage d’arrêts de ,811. Pas étonnant donc que l’Avalanche ait dû attendre jusqu'à son cinquième match pour signer sa première victoire de la saison.

J’ai toujours cru que les succès d’un gardien passaient par trois points fondamentaux : un bon positionnement, être arrêté au moment où le tir est décoché, et être perpendiculaire à la rondelle. En ce moment, ces trois éléments font défaut à Georgiev. Sans ces éléments de base, sa confiance se trouve évidemment au plus bas.

Et un gardien qui n’est pas en confiance a tendance à manquer de patience, à jouer de manière plus reculée dans son demi-cercle, et à se concentrer uniquement sur la rondelle, et donc à avoir une vision en tunnel qui ne lui permet pas de bien analyser comment le jeu est en train de se dérouler.

Voici deux exemples qui illustrent le manque de confiance du cerbère de l’Avalanche. Sur ce but de David Pastrnak contre les Bruins de Boston, Georgiev est très mal positionné, avec son patin droit à l’extérieur de son poteau, ce qui l’empêche de se donner une véritable poussée vers sa gauche. Il semble aussi ne pas savoir du tout que Pastrnak se trouve à l’embouchure du filet.

BOS@COL: Pastrnak complète une superbe passe en A.N.

Le manque de patience de Georgiev s’est manifesté à plusieurs reprises jusqu’ici, notamment sur ce but de Brock Nelson des Islanders. Même si son équipe commet un très mauvais revirement, et que Nelson se débarrasse facilement de son défenseur, Georgiev se lance rapidement sur la glace. La règle d’or pour un gardien est de ne pas se commettre avant que le joueur se soit lui-même commis, et on voit sur cette séquence à quel point il devient facile pour Nelson de le battre une fois que Georgiev s’est commis.

NYI@COL: Nelson se fraie un chemin vers le filet

C’est un peu la même chose pour Tristan Jarry des Penguins de Pittsburgh. Avec une moyenne de buts alloués de 5,47 et un pourcentage d’arrêts de ,836, il est surprenant qu’il ait réussi à signer une victoire cette saison. On lui préfère d’ailleurs Joel Blomqvist depuis quelque temps à Pittsburgh.

Je parlais de l’importance d’être arrêté lorsqu’un tir est décoché dans mes trois éléments fondamentaux. Regardez Jarry sur ce but, il se déporte encore vers sa droite quand le tir de Jordan Greenway est décoché, ce qui l’empêche de réaliser ce qui aurait dû être un arrêt facile.

BUF@PIT: Greenway fait 2-0 Sabres

Tout n’est pas perdu pour Georgiev comme pour Jarry. Un gardien de leur calibre n’a pas disputé autant de matchs dans la LNH sans avoir trouvé un moyen de corriger la situation quand la confiance n’est pas à son sommet. Le lancer le plus important devient le prochain, et ils doivent y aller un tir à la fois, sans se soucier de ce qui s’est déjà passé plus tôt dans la rencontre.

À ce niveau, les gardiens savent ce qu’ils ont fait de mal et qui a fait en sorte qu’ils ont donné un mauvais but. Ils doivent simplement être capables d’autoanalyser froidement leur performance et d’apporter les correctifs nécessaires en cours de match.

Mais pour retrouver ses repères, ça passe essentiellement par l’entraînement et le travail dans la salle de vidéos avec l’entraîneur des gardiens. On peut corriger certaines choses dans les pratiques, qu’on peut transposer dans les parties, car c’est vraiment dans les matchs que la confiance va revenir.

Si c’était facile de déborder de confiance, qu’il suffisait d’aller en acheter en grande quantité chez Costco, ce serait vraiment facile de garder les buts dans la LNH. Il s’agit toutefois d’un travail ardu et de longue haleine. Je demeure toutefois persuadé que la situation va se régler pour ces deux vétérans. Reste à voir si elle va se régler avant qu’il ne soit trop tard pour leur équipe respective.

Un gardien combatif comme je les aime

À l’autre bout du spectre, il y a plusieurs gardiens qui vont très bien depuis le début du calendrier. Dans le lot, on retrouve les candidats perpétuels au trophée Vézina que sont Igor Shesterkin des Rangers de New York, Connor Hellebuyck des Jets de Winnipeg et Andrei Vasilevskiy du Lightning de Tampa Bay.

Parmi les gardiens qui présentent les meilleures statistiques jusqu’ici, on retrouve aussi Dustin Wolf, qui aide les Flames de Calgary à créer une certaine surprise en étant toujours invaincus depuis le début de la campagne (4-0-0).

Wolf, avec sa fiche de 2-0-0, sa moyenne de buts alloués de 2,02 et son pourcentage d’arrêts de ,944, est en train de montrer qu’un gardien au gabarit atypique est encore capable de tirer son épingle du jeu dans la LNH d’aujourd’hui.

À 6 pieds et 175 livres, Wolf est un gardien doté d’un gabarit qui ressemble au mien quand je jouais… mais à l’époque, j’étais considéré comme dans la moyenne des gardiens! Aujourd’hui, ce sont tous des mastodontes de 6 pieds 3 pouces et plus!

Je ne connaissais pas beaucoup Wolf avant la présente campagne, mais j’adore son style, qui me fait beaucoup penser à celui d’un autre petit gardien, Juuse Saros des Predators de Nashville.

Il est très intelligent, ses déplacements sont impeccables et « crisp » en bon français, ce qui signifie qu’il se déplace rapidement et arrête pile au bon endroit, ce qui lui permet de battre la passe et d’être perpendiculaire au tir.

On voit sur cette séquence que ses talons sont au sommet de son demi-cercle. C’est très important pour un gardien de son gabarit d’être loin de son but de manière à bien fermier les angles. Mais pour adopter ce style, il faut aussi être combatif et être prêt à sortir de sa technique pour réaliser l’arrêt à tout prix.

C’est phénoménal ce que ce gardien est parvenu à faire jusqu’ici au cours de sa carrière. Il a tout de même été nommé gardien par excellence de sa ligue au cours des quatre dernières saisons! Il est vraiment en train de faire mentir les pronostics, et c’est tout à son honneur.

En espérant pour lui et les Flames que ça se poursuive pour le reste de la saison.

*Propos recueillis par Sébastien Deschambault, directeur de la rédaction LNH.com