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CRANBERRY, Pennsylvanie — Erik Karlsson est sans réserve lorsqu’on lui demande les visées des Penguins de Pittsburgh pour la prochaine saison.

« Jusqu’au bout », a-t-il simplement répondu en entrevue à LNH.com, jeudi.

Le Suédois est devenu le sixième défenseur de l’histoire de la LNH à récolter 100 points lors d’une même saison. Il en a obtenu 101 avec les Sharks de San Jose et ses efforts ont été récompensés lorsqu’il a remporté le trophée Norris, remis annuellement au meilleur défenseur de la LNH, en juin. Mais le trophée qu’il convoite réellement, c’est la Coupe Stanley. Et avec les Sharks, Karlsson semblait à des lunes de cet objectif.

Maintenant, le scénario est différent. Il y a plus d’un mois, il a été échangé aux Penguins et est devenu le quatrième membre d’un impressionnant noyau de quatre vétérans avec Evgeni Malkin (37 ans), Sidney Crosby (36) et Kris Letang (36). Karlsson, à 33 ans, est le « jeunot » du groupe. Les quatre devraient être intronisés au Temple de la renommée du hockey après leur carrière.

Ce sera toutefois la discussion d’un autre jour pour Karlsson. Pour l’instant, son viseur est sur le championnat. Un objectif réaliste selon le Suédois, même si certains mettent en doute le groupe vieillissant de l’équipe de la Pennsylvanie.

« La moyenne d’âge de notre quatuor est d’environ 35 ans, et puis? Lorsque je suis arrivé dans la ligue, les joueurs paraphaient leur première entente de qualité à 35 ans », a rappelé Karlsson, non sans exagération.

Les détracteurs, selon lui, ne prennent pas en considération la feuille de route des trois vedettes qui l’entoureront.

« Ils ont tous gagné par le passé. Ils savent ce qui doit être fait, a-t-il souligné. Le jeu a peut-être changé, mais quoi qu’il en soit, nous nous engageons à gérer de manière optimale le talent que nous avons dans ce vestiaire. »

Crosby, Malkin et Letang marqueront d’ailleurs l’histoire du sport professionnel cette saison. Ils deviendront le premier trio de joueurs dans l’histoire des quatre ligues majeures nord-américaines (LNH, MLB, NFL, NBA) à disputer 18 saisons ensemble. Ils battront le record qu’ils codétenaient avec Derek Jeter, Mariano Rivera et Jorge Posada des Yankees de New York, pour qui ils ont évolué de 1995 à 2011.

Ils ont gagné trois fois la Coupe Stanley (2009, 2016, 2017) et ont aidé Pittsburgh à atteindre les séries éliminatoires 16 fois d’affilée, de 2007 à 2022. C’est le printemps dernier que leur séquence a pris fin. L’équipe a terminé un point derrière les Panthers de la Floride et la deuxième place de quatrième as donnant accès aux séries dans l’Est.

Lorsque Kyle Dubas, directeur général de l’équipe, a été embauché le 1er juin, le derby Karlsson était l’une de ses priorités afin d’atteindre l’objectif ultime, celui de remporter la Coupe Stanley avant le départ du noyau de vétérans.

Le 6 août, le Suédois s’est amené à Pittsburgh dans un échange qui impliquait également les Canadiens de Montréal. Les Sharks ont accepté de retenir un peu plus de 13% des 11,5 millions $ que Karlsson obtient annuellement grâce à son contrat actuel, signé avec l’équipe californienne en 2019.

Le défenseur est le premier à l’admettre, son contrat constituait depuis plusieurs mois un obstacle aux potentiels échanges. Sa famille et lui aiment San Jose, mais son but de remporter les grands honneurs ne concordait pas à celui de l’équipe, présentement en reconstruction. Il aurait voulu passer à une équipe prétendante avant la dernière date limite des transactions, sans succès.

Son vœu est maintenant exaucé, quelques mois plus tard.

« La situation n’était pas idéale, j’ai toujours été ouvert et transparent à ce sujet, a expliqué Karlsson. J’aurais aimé qu’il y ait un dénouement plus tôt et que ce soit plus clair, mais le monde des affaires ne fonctionne pas ainsi. Et je savais que ma situation de l’époque n’allait probablement pas être simple à gérer.

« Je suis déménagé aux États-Unis pour jouer au hockey et gagner, et j’ai une bonne chance de le faire ici », a-t-il ajouté en balayant du regard le vestiaire des Penguins.

Son nouvel entraîneur-chef, Mike Sullivan, a rapidement pu voir à quel point l’équipe venait de mettre la main sur un patineur fluide et un joueur partageant quelques traits communs avec Crosby, le capitaine et visage de la concession.

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« J’ai toujours apprécié le joueur qu’il était, mais au fil des discussions que j’ai eues avec lui, j’ai vu à quel point il est compétitif et qu’il a un grand désir de remporter la Coupe Stanley, a-t-il souligné. Il nous en parle beaucoup depuis son arrivée. Il a eu la même conversation avec Kyle Dubas. C’est important pour nous, car c’est également notre priorité. »

« On peut savoir qu’un joueur est compétitif uniquement par la manière dont il joue. Mais en apprenant à le connaître personnellement, j’ai pu mieux voir la fougue et le désir qui l’habitent. »

Il a aussi pu constater que, dans sa quête pour devenir meilleur, Karlsson ne se gêne pas pour cuisiner ses entraîneurs au sujet des plans de match et des systèmes de jeu.

« Il pose un nombre incalculable de questions, a admis Sullivan en rigolant. Il est très insistant. Nous blaguons à ce sujet parmi le groupe d’entraîneurs, mais nous apprécions vraiment sa démarche, parce qu’il est pleinement investi dans le processus d’apprentissage. Il est intrigué par certaines de nos tactiques, de nos stratégies, et même de notre logistique. »

Ça vous fait penser à quelqu’un?

« Notre capitaine est sorti du même moule, a ajouté Sullivan. J’ai toujours admiré ça de la part de Sid. Nous avons en fait quelques gars comme ça, alors il va s’intégrer sans problème. »

La première séance sur glace du camp ne sert pas vraiment à juger de quoi aura l’air une équipe lorsque la saison régulière va s’amorcer. Néanmoins, il était intéressant de voir les combinaisons utilisées pour les deux premières paires de défenseurs des Penguins jeudi : Karlsson a patiné aux côtés de son compatriote suédois Marcus Pettersson, tandis que Letang était le partenaire de l’imposant Ryan Graves (6 pieds 5 pouces, 220 livres).

Il faut remonter à très loin pour trouver une édition des Penguins où Letang n’a pas été le quart-arrière de la première vague du jeu de puissance des Penguins. Karlsson aura la chance de décrocher ce rôle, ce qui reléguerait Letang à la deuxième unité.

Letang, le meneur de l’histoire des Penguins parmi les défenseurs pour les buts (156), les passes (535) et les points (691), affirme néanmoins qu’il a toujours souhaité que l’équipe fasse l’acquisition de Karlsson.

« J’ai trouvé cet échange incroyable, a-t-il assuré. Chaque fois que vous avez la chance d’ajouter un joueur ce calibre, surtout avec ce qu’il a accompli l’an dernier, c’est fantastique. »

L’attaquant Jeff Carter est bien placé pour savoir ce qu’un défenseur d’élite peut apporter à une équipe qui aspire à un championnat. Il a vu son coéquipier Drew Doughty être le pilier derrière deux conquêtes de la Coupe Stanley par les Kings de Los Angeles en 2012 et 2014.

Lorsqu’il regarde à la ligne bleue de Pittsburgh, il y retrouve deux joueurs talentueux et infatigables en Karlsson et Letang.

« Son jeu parle évidemment de lui-même, avec tout ce qu’il peut accomplir sur la glace, a mentionné Carter au sujet de Karlsson. Avec lui et “Tanger” à l’arrière, qui vont probablement être sur la glace pendant le trois quarts de la rencontre, c’est assez impressionnant.

« De plus, il évolue dans cette ligue depuis longtemps, il a pris part à de nombreux matchs importants, que ce soit dans la LNH ou sur la scène internationale. Il sait ce que ça prend pour gagner. Je pense qu’il va très bien cadrer avec nous. »

Sans oublier que Carter n’aura plus à affronter Karlsson.

« Je préfère l’avoir dans mon équipe plutôt que de le pourchasser sur la patinoire, a admis Carter. Il est tout un joueur. Sa présence se fait déjà sentir dans le vestiaire.

« Je crois qu’il va avoir tout un impact avec nous. »

* * * *

Les dernières semaines ont été un véritable tourbillon pour Karlsson et sa famille. Son épouse Melinda, sa fille Harlow, qui va avoir 4 ans le 3 octobre, et son fils d’un an Stellan l’ont récemment rejoint à Pittsburgh et ont emménagé dans leur nouvelle maison.

Harlow adore les mascottes, et a reçu la visite de S.J. Sharkie, la mascotte de San Jose, au domicile des Karlsson en Californie avant leur départ vers la côte est. La mascotte a apporté une rose à la petite fille survoltée, et ils ont tous deux joué avec ses jouets avant de se dire adieu.

Karlsson est persuadé que sa famille va adorer la transition vers Pittsburgh, comme ce fut le cas pour lui.

« Je ne savais pas ou du moins je n’avais pas réalisé à quel point c’est beau ici, a-t-il dit. C’est très vert. Il y a beaucoup de collines. Le paysage est magnifique. Je suis un grand adepte du paysage, alors j’adore ce genre de chose. Moi et ma famille allons adorer ça ici. Les gens avec qui j’ai eu des contacts jusqu’ici à l’épicerie et ailleurs ont été extrêmement amicaux. Nous nous sentons déjà chez nous, ce qui rend notre adaptation plus facile.

« En ce qui concerne l’équipe, je commence à très bien comprendre cette organisation et je me rends compte à quel point ils sont professionnels. On peut le ressentir quand on arrive ici. »

Il est reconnaissant envers Dubas, Sullivan et le reste de l’organisation pour la chance qui lui est offerte.

« Dès le départ, lorsque nous avons commencé à avoir des discussions, l’organisation, menée par Kyle, insistait sur le fait que je cadrais parfaitement avec eux, a-t-il raconté. En tant que joueur et comme personne, c’est très flatteur, et je vais toujours être reconnaissant envers eux pour avoir tout fait pour que je débarque ici. »

Être le coéquipier de Crosby est aussi quelque chose de spécial. Le plus près que Karlsson s’est approché de la Coupe Stanley remonte à sa participation à la finale de l’Association de l’Est en tant que membre des Sénateurs d’Ottawa en 2017. Les Penguins de Crosby avaient éliminé les Sénateurs en l’emportant 3-2 dans le match no 7 sur un but de Chris Kunitz à 5:09 de la deuxième période de prolongation.

Les deux adversaires sont maintenant devenus amis.

« J’ai vraiment hâte que nous amorcions ce nouveau périple ensemble, a lancé Karlsson. Nous sommes maintenant coéquipiers. J’ai déjà appris bien des joueurs avec lui que j’aurais aimé savoir lorsque je jouais contre lui, mais je ne vais assurément pas vous dire ce que c’est. »

Il a éclaté de rire, ce qui lui arrive souvent par les temps qui courent affirme-t-il.

« Jusqu’ici, tout a été super, a-t-il déclaré. J’ai hâte que ça commence.

« Nous avons la chance de réaliser des choses spéciales. J’en suis vraiment persuadé. »

Article écrit en collaboration avec Wes Crosby, correspondant indépendant NHL.com

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