Louis Crevier CHI badge Lepage

Il s’était écoulé moins de 48 heures depuis le premier match de Louis Crevier dans l’uniforme des Blackhawks de Chicago quand on a rejoint son ancien entraîneur Yanick Jean au bout du fil.

C’était loin d’être la première fois que celui qui combine les fonctions de pilote et de directeur général des Saguenéens de Chicoutimi parlait du grand défenseur de 6 pieds 8 pouces. Il a en fait passé beaucoup de temps à vanter ses mérites à l’époque où il évoluait sous sa férule, entre 2018 et 2021.

« Si tu savais le nombre de dépisteurs auxquels j’ai dit qu’un jour, il jouerait dans la LNH, s’est-il exclamé, fier de sa prophétie désormais réalisée. Ils ont été plusieurs à douter de ça. Il a fallu qu’un dépisteur y croie, qu’il pousse pour Louis et que son organisation lui fasse confiance.

« Il a fallu pousser pour Louis… Je vais arrêter de me lancer des fleurs, ce n’est pas ça le but! Reste que c’était rare qu’on venait pour le voir à l’œuvre en premier. »

Un peu plus de deux semaines après ce premier match disputé le 3 décembre, Crevier fait lentement sa place au sein de la brigade défensive des Blackhawks. Le Québécois disputera son neuvième match de la saison vendredi soir, alors qu’il affrontera l’équipe de chez-lui, les Canadiens de Montréal, au United Center vendredi (20h30 HE; RDS, TSN2, NBCSCH).

Crevier a amassé deux passes lors de ses huit premières parties. L’arrière de 22 ans est utilisé en moyenne 15:59 et montre un différentiel de moins-5.

Sur papier, les équipes de la LNH seraient nombreuses à vouloir aligner un défenseur droitier qui mesure 6 pieds 8 pouces et pèse 228 livres. Mais cela implique un travail de projection plutôt complexe au moment où ledit défenseur est en pleine croissance et apprivoise lentement son corps au niveau junior.

C’est la tâche qu’a su relever Alexandre Rouleau, dépisteur des Blackhawks depuis maintenant huit ans. Au fil des saisons, il a eu quelques discussions intéressantes avec Jean au sujet de Crevier avant que les Blackhawks ne fassent de lui leur choix de septième ronde (188e au total) en 2020.

On se souviendra que les Blackhawks avaient réalisé une transaction avec les Canadiens pour obtenir un choix de septième tour et tenter leur chance avec le natif de Québec.

« Yanick a toujours beaucoup cru en Louis, s’est souvenu le dépisteur. Il n’a jamais eu aucun doute dans son esprit qu’il allait devenir un joueur de la LNH et il ne se gênait pas pour nous le partager, ça c’est certain (rires). Il nous disait qu’on allait mal paraître un jour si on ne le repêchait pas. »

À travers ces discussions, Rouleau a fait ses devoirs pour s’assurer de ne pas échapper un talent… et probablement aussi pour éviter que Jean lui remette éventuellement son omission sur le nez.

Il a assisté à plusieurs matchs des Saguenéens, et s’est même rendu à des entraînements pour valider ses observations et éliminer les doutes qu’il pouvait avoir à l’égard de l’imposant arrière. Des doutes qui avaient fait en sorte qu’aucune équipe n’avait osé prendre une chance avec lui à sa première année d’admissibilité.

« Parfois, à cette grandeur-là, c’est 'plate', mais tu as l’air un peu moins synchronisé, a expliqué Rouleau. Dans les entraînements, c’est là que je le voyais bouger et que je voyais que son jeu de pieds était agréable à regarder. C’est souvent plus difficile à déceler pendant un match en raison des circonstances. »

« Louis a toujours eu une bonne vitesse, a argué Jean. Il a dû améliorer sa mobilité en espace restreint qui l’empêchait justement de se servir de son corps pour jouer physique. Il n’était pas en plein contrôle de son corps, mais à force d’améliorer ses pieds, tout son jeu a suivi.

« Un grand bonhomme de 6 pieds 8 pouces qui a de bons pieds, une bonne lecture du jeu et de bonnes mains, il faut prendre le temps de développer ça. »

Progression

Le boulot ne fait que commencer pour Crevier. Il est tout de même intéressant de constater qu’il répond aux attentes que Jean et Rouleau avaient à son endroit, il y a de cela quelques années, quand ils étaient peu nombreux à croire en son potentiel.

« Il apporte beaucoup de stabilité et il a gagné en maturité, a soulevé Rouleau. J’entendais de bons commentaires à l’interne sur sa progression. Ce n’est pas fini. Se rendre, c’est une chose, rester, c’en est une autre. Mais c’est un super bel accomplissement et je suis vraiment content pour lui. »

Rouleau est aussi heureux d’avoir tenu son bout pendant le repêchage pour finalement convaincre son patron de l’époque, Stan Bowman, de la nécessité d’ajouter Crevier à la banque d’espoirs de l’équipe.

« Louis avait beaucoup de potentiel et on avait parlé de lui souvent dans l’année parce qu’il cadrait bien avec nos exigences, a-t-il conclu. Il nous avait intrigués toute l’année. Quand Stan m’a dit qu’il trouvait que le jeu en valait la chandelle en faisant l’échange, je lui ai dit qu’il allait être bien content dans quelques années.

« Je l’ai déjà dit sans que ça fonctionne (rires), mais je suis obligé d’admettre aujourd’hui que ce coup-là en était un bon. »