La magie, c'est de pratiquer la gratitude au quotidien et de réaliser aussi à quel point on a de la chance. Cette magie n'est pas exclusive à Noël, elle peut opérer n'importe quand, comme vous le lirez dans ce conte de LNH.com tiré d'une histoire vraie, tout juste romancée, qui nous a été racontée par notre collègue Zdenek Matejovsky, en cette journée de la fête de la Nativité. Le petit Tobias, 8 ans, ne pouvait pas recevoir de plus beau cadeau en 2022 que celui que ce reporter globe-trotter québécois lui a permis de déballer en plein mois de juillet dans sa Slovaquie natale. Bonne lecture!
Cette journée-là de juillet 2022, la petite ville de Poprad ne lésina pas sur les moyens afin de souligner un événement historique.
Noël en juillet en Slovaquie
Le petit Tobias n'oubliera pas de sitôt « Zee », le reporter globe-trotter marchand de bonheur
Quelques jours plus tôt, la Slovaquie avait vu trois de ses jeunes fleurons être sélectionnés au premier tour de la séance de repêchage dans la LNH. C'était du jamais vu pour la petite nation de 5,5 millions de personnes.
Au cours de la mémorable soirée du 7 juillet à Montréal, Juraj Slafkovsky, Simon Nemec et Filip Mesar rendirent fière toute une génération de sportifs de leur pays.
Le grand attaquant Slafkovsky marqua l'histoire le premier en étant choisi au tout premier rang du repêchage par les Canadiens. Le charismatique « Slaf » reçut le traitement de rock star au Centre Bell dès qu'il enfila le chandail de l'équipe-hôte du repêchage.
Il ne s'était pas remis de ses émotions que son ami Nemec fut le choix des Devils du New Jersey, tout juste derrière.
L'autre mousquetaire, Mesar, compléta le tour du chapeau inespéré, en étant réclamé par les Canadiens en 26e position.
« À nous Montréal, mon ami ! Wow c'est incroyable ! », lui lança Slaf en Slovaque, avant de l'enlacer et de le soulever de terre, devant une horde de journalistes.
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La Fédération de hockey slovaque entend souligner l'événement comme il se doit, en permettant aux amateurs de rencontrer les trois nouveaux héros ainsi que les trois autres espoirs slovaques réclamés. C'est au bel aréna de Poprad qu'on décida de tenir le rassemblement festif.
Poprad est une ville récréotouristique de 50 000 habitants, la 10e en importance en Slovaquie, sise à l'ombre de la majestueuse chaîne de montagnes des Hautes Tatras.
Pour Nemec et Mesar, c'est à un jet de pierre de leur lieu de naissance, Liptovsky Mikulas et Kezmarok, respectivement. Slafkovsky est natif d'un peu plus loin, de la ville de Kosice située à environ une heure de route au sud de Poprad.
C'est une journée pluvieuse, mais rien au monde ne viendra refroidir l'engouement des amateurs de hockey, qui affluent de partout. Avant même l'ouverture des portes de l'aréna, tôt le matin, un impressionnant cordon de gens prend forme à l'extérieur.
De sa Tchéquie natale, à environ quatre heures de route de là, Zdenek Matejovsky se présenta sur place. Pas comme amateur, mais comme reporter globe-trotter. Zdenek, ou « Zee », comme on le surnomme affectueusement, est très connu dans le petit monde du hockey.
De Chambly à Helsinki, ce Québécois d'adoption n'a pas besoin de présentation dans les arénas d'Europe et d'Amérique. Depuis des lunes, il est un des rares liens, sinon le seul, entre les joueurs européens évoluant dans la LNH et les amateurs de leur pays respectif. Avec sa bouille sympathique et sa caméra scotchée à la main, c'est impossible de ne pas aimer le personnage.
Zee a tout vu en plus de 30 ans de carrière, mais il doit se pincer pour réaliser la chance qu'il a depuis que les Canadiens ont repêché Slafkovsky, plutôt que Shane Wright comme plusieurs observateurs le pensaient. Ce n'est rien de personnel contre Wright, mais sa préférence pour Slafkovsky allait de soi puisque sa clientèle est exclusivement européenne. Il faut dire que l'indice du bonheur de Zee augmente chaque fois qu'un Européen joint les Canadiens.
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À son retour à Prague pour l'été, cette première sortie publique du trio était un incontournable pour lui. Il savait que l'événement serait très couru, mais jamais au point de ce qu'il constata en se pointant à l'aréna. Les rues avoisinantes et le stationnement sont bondés. Les gens se massent par centaines à la queue leu leu devant l'entrée, malgré la pluie.
En se dirigeant vers la porte d'entrée avec son sac d'équipement, un père accompagné de son fils l'interpella.
- Bonjour monsieur. Est-ce que vous faites partie de l'organisation?
- Non pourquoi?
- Ah, c'est que mon fils et moi aimerions entrer à l'intérieur, mais je crains que ce soit mission impossible avec cette foule dehors. La famille part en vacances dans quelques heures, nous manquerons sûrement de temps. Aussi, ma conjointe nous a interdit de venir ici aujourd'hui parce qu'elle ne veut pas qu'un d'entre nous attrape la COVID au début des vacances. Mais mon fils Tobias, qui a huit ans, aimerait beaucoup rencontrer les trois jeunes. Pour dire vrai, ce serait un rêve pour lui. Vous pouvez nous aider, pensez-vous?
- Non malheureusement, je ne peux pas vous aider. Désolé.
Puis, Zdenek poursuivit son chemin, avant de se raviser au bout de quelques secondes. Il retourna voir le père.
- J'y pense, peut-être que je peux vous aider. Laissez-moi votre fils quelques instants, je vais essayer quelque chose.
Il se rendit jusqu'à l'entrée avec l'enfant, jusqu'à ce qu'un gardien de sécurité l'intercepta.
- Hé, où allez-vous comme ça? Où est votre accréditation?
- Mon accréditation? La seule que j'ai, c'est celle-là, répondit Zdenek en brandissant son laissez-passer des Canadiens.
- Non, non… Vous devez avoir une accréditation valide pour la journée.
- Et où peut-on en obtenir une?
- Dans l'édifice d'à côté, auprès de la Fédération slovaque.
Zdenek se rendit donc avec Tobias au centre de presse de l'événement. Rendu là-bas, il tomba sur le président de la fédération lui-même, Miroslav Satan. Zdenek connaît très bien l'ancien attaquant de la LNH pour avoir rapporté ses exploits plus d'une fois au cours de sa carrière.
- Mon cher Zdenek, qu'est-ce que je peux faire pour toi?
- Il me faut une accréditation pour rentrer dans l'aréna.
- Oui, aucun problème, je t'en fais une. Et le petit qui est avec toi, tu veux aussi une accréditation pour lui?
- Oui, oui, s'il te plaît. Tobias est mon valeureux assistant pour la journée.
- Pas de problème. C'est important de former la relève, Zdenek, tu ne rajeunis pas, le taquina Satan.
- Ha ha, oui « Miro », il y a juste toi bien sûr qui ne vieillis pas, lui rétorqua Zdenek.
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C'est de cette façon, tout simplement, que Zdenek et son bras droit d'une journée firent leur entrée par la grande porte de l'amphithéâtre.
Zdenek sentit Tobias fébrile en marchant vers l'estrade. Sac sur l'épaule, l'enfant ne voyait pas grand-chose avec tous ces gens l'entourant. Il s'acquittait de sa tâche avec beaucoup de sérieux. Ses yeux s'illuminèrent à la vue de ses trois idoles, plus grands que nature.
Zee leur présenta Tobias comme un de leurs nouveaux admirateurs. À tour de rôle, Slaf, Nemec et Mesar prirent le temps de signer des photos et de poser en sa compagnie. Emporté dans un tourbillon, le garçon ne semblait pas réaliser ce qui lui arrivait. Voyant cela, Slaf tenta de chasser sa timidité.
- Es-tu un joueur de hockey?
- Oui.
- Tu t'amuses avec tes amis, j'espère. C'est important d'avoir du plaisir à jouer.
Tobias ne fit que hocher la tête, en signe d'approbation.
Zdenek effectua par la suite son boulot pendant que Tobias épia les moindres faits et gestes du trio avec d'autres admirateurs.
Une quinzaine de minutes plus tard, Zdenek remit le blondinet gamin à son père dans le stationnement. Il retrouva soudainement l'usage de la parole! Il en avait long à raconter.
- Regarde papa, tous les autographes que j'ai eus. Ils ont tellement été gentils avec moi. Juraj m'a même demandé si je jouais au hockey.
Les yeux du paternel se remplirent d'eau. La voix étreinte par l'émotion, il remercia Zdenek pour sa bonté.
- Jamais je ne pourrai vous être assez reconnaissant pour tout ce que vous avez fait pour mon fils. Vous êtes un homme bon. Je me féliciterai toute ma vie de vous avoir abordé tantôt.
- Ce n'est rien. Quand je peux aider, ça me fait toujours plaisir de le faire.
Puis, le paternel se tourna vers son fils.
- Maintenant fiston, il faut trouver une façon de tout raconter à ta mère sans qu'elle se fâche. Je pense qu'elle va comprendre.
Zdenek leur dit qu'ils peuvent lui attribuer tout le blâme sans problème, au besoin.
Ils rirent de bon cœur, et, là-dessus, ils échangèrent leurs coordonnées pour l'envoi de photos-souvenirs, avant de se dire au revoir.
- Hé monsieur Zee, lança Tobias à Zdenek qui se dirigeait vers sa voiture. Je veux juste vous dire que je suis disponible pour être votre assistant n'importe quand et n'importe où dans le monde.
- C'est bon à savoir jeune homme, lui répondit-il, parce que je ne rajeunis pas...
\Crédit photos : Zdenek Matejovsky*