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LAS VEGAS – Jérémie Poirier a déjà deux saisons de hockey professionnel dans le corps, et quatre ans se sont écoulés depuis que les Flames de Calgary ont fait de lui leur choix de troisième tour. Mais il y a une chose qu’il expérimentera pour la première fois : un repêchage en bonne et due forme.

Le défenseur de 22 ans a fait le voyage jusque dans le désert du Nevada avec toute la famille pour vivre le repêchage de son frère Justin, l’attaquant du Drakkar de Baie-Comeau.

« Le repêchage, c’est un grand moment dans une carrière, a lancé Jérémie lorsqu’on l’a rencontré dans un hôtel de la Strip, jeudi. Je suis content que Justin ait la chance de le vivre avec tout son monde. Je vis un peu le rêve du jour de repêchage à travers lui. »

Parce que Jérémie n’a pas eu cette chance. Son repêchage était en 2020. Oui, l’infâme année de pandémie qu’à peu près tout le monde préférerait oublier. L’aîné a encore des souvenirs bien clairs de ces journées d’octobre passées au Nouveau-Brunswick, alors qu’il s’alignait avec les Sea Dogs de Saint-Jean.

Posté devant ses multiples écrans au domicile de sa famille de pension, le défenseur avait passé ces moments, habituellement spéciaux, loin de ses proches en raison des règles de quarantaine en vigueur à cette triste époque. Il n’avait pu rentrer au Québec parce que sa saison était déjà en cours.

« Mes parents n’avaient pas pu venir parce qu’ils auraient dû faire une quarantaine de deux semaines s’ils étaient traversés au Nouveau-Brunswick, s’est-il souvenu. J’étais donc avec ma blonde, mes parents de pension et quelques coéquipiers. Ma famille de pension avait quand même organisé une belle journée.

« Quand les Flames m’ont téléphoné pour m’annoncer qu’ils me repêchaient, j’ai tout de suite fait un appel vidéo avec ma famille. C’était un peu différent. Quand tu raccroches, tu te sens quand même seul. »

Justin n’aura heureusement pas à vivre ça. Tout le clan est réuni à Las Vegas dans l’espoir de voir le jeune homme entrer dans la grande ligue par la grande porte.

« Je suis content que Jérémie ait finalement la chance de le vivre en présentiel, même si c’est mon repêchage, a-t-il souligné. À Vegas, dans la Sphère, c’est encore plus le fun. On va profiter du moment. »

Le cadet peut aussi se réjouir d’avoir à ses côtés un grand frère qui est passé par là et qui a vécu de l’adversité. Parce qu’après une saison remplie de succès sur la patinoire, le jeune Poirier a aussi connu son lot de déceptions. Sa taille de 5 pieds 7 pouces semble davantage attirer l’attention que ses 51 buts.

Il n’a pas été invité au Match des meilleurs espoirs de la LCH ni à la séance d’évaluation des joueurs de la LNH. À la veille du premier tour du repêchage, il est bien difficile de prévoir où et quand il sera sélectionné.

« C’est un peu facile à dire, mais je ne veux pas trop m’en mettre sur les épaules, a dit Justin. Tout ce qui s’est passé cette saison m’a servi de source de motivation. Le pire des scénarios serait de ne pas me faire repêcher, mais si je glisse, ce n’est pas grave. Je sais que l’équipe qui va me repêcher va croire en moi. »

Glissade contrôlée

Le grand frère est probablement derrière cette philosophie. Il était classé au 18e rang sur la liste finale des patineurs nord-américains du Bureau central de dépistage. Il a été réclamé au 72e échelon. Ça ne l’a pas empêché d’être nommé sur l’équipe d’étoiles des recrues à sa première saison dans la Ligue américaine.

« Ce n’est pas la fin du monde, a réagi Jérémie. Ça prend juste une équipe qui t’aime. Il faut éviter de se projeter ou de se mettre trop de pression. C’est une journée qui arrive juste une fois dans une vie. Il faut vivre le moment. Ça ne donne rien de se stresser avec ça. Ça ne va rien changer au moment.

« C’est certain que j’aimerais que Justin ait plus de reconnaissance, mais il y a des gens qui vont voir son talent. Il a fait tout ce qu’il pouvait sur la glace. Il faut attendre que quelqu’un le reconnaisse. »

Peut-être que les Flames, encouragés par l’expérience positive du choix plus tardif de Jérémie, seront cette équipe. Justin a dit avoir eu de bonnes conversations avec la formation albertaine. Les deux frangins ne s’empêchent d’ailleurs pas de rêvasser un peu en attendant le jour J.

« Depuis qu’on est petits qu’on aimerait jouer ensemble, a conclu Jérémie. On n’a jamais joué dans la même équipe à cause de notre différence d’âge. Ce serait une première. C’est sûr que c’est au fond de notre tête. On aimerait se retrouver au même endroit, au même moment. »

Si ça devait se produire, les grandes émotions qu’ils vivront mettront assurément un baume sur les souvenirs en demi-teinte de la journée de repêchage de l’aîné. Et ce n’est pas lui qui s’en plaindrait.

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