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La cérémonie d’intronisation du Temple de la renommée du hockey 2024 aura lieu lundi. La cuvée de cette année inclut Pavel Datsyuk, Shea Weber, Jeremy Roenick, Natalie Darwitz, Krissy Wendell-Pohl, Colin Campbell et David Poile. Aujourd’hui, le journaliste principal NHL.com Dan Rosen dresse le portrait de Campbell.

TORONTO – Quand il fait suffisamment froid, le lac Lisgar à Tillsonburg, en Ontario, devient une patinoire, comme beaucoup de plans d’eau au Canada. Il y a des années, Colin Campbell y jouait au hockey, comme beaucoup de jeunes filles et garçons canadiens.

À l’époque, Campbell ne réfléchissait pas encore aux règlements et aux innovations à apporter au hockey, même s’il avait 10 ans lorsqu’il a obtenu son premier certificat d’arbitre. Malgré tout, c’est sur cette glace que Campbell a commencé à penser à la manière dont le hockey devrait être joué et que son regard sur ce sport s’est développé.

« Je me rappelle que si tu accrochais un joueur, il se retournait et te disait : "Qu’est-ce que tu fais là, idiot? Ne fais pas d’accrochage quand on joue sur l’étang", a dit Campbell. Quant à un coup de bâton, tu ne pouvais tout simplement pas faire ça. C’est de cette façon que le hockey devrait être joué; de manière pure. »

Des années plus tard, cette quête de rendre le hockey le plus pur possible au plus haut niveau va conduire Campbell au Temple de la renommée du hockey dans la catégorie des bâtisseurs. L’homme de 71 ans, qui agit comme vice-président principal des opérations hockey de la LNH, sera intronisé lundi aux côtés de David Poile, Natalie Darwitz, Jeremy Roenick, Shea Weber, Pavel Datsyuk et Krissy Wendell-Pohl.

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Campbell a coordonné chaque innovation apportée par la LNH depuis qu’il occupe un poste de direction au sein de la Ligue, en 1998. Auparavant, il a disputé 11 saisons comme défenseur dans la LNH et passé 13 campagnes derrière un banc, incluant plus de trois saisons comme entraîneur des Rangers de New York (1994 à 1998).

C’est en partie grâce à la vision de Campbell et à sa capacité à diriger un département des opérations hockey qui supervise tout ce qui se déroule sur la glace que le hockey d’aujourd’hui est aussi électrisant. Dans tout ça, Campbell a agi comme mentor et conseiller, et il a parfois été la cible de critiques.

Mais ses idées sont manifestes dans la manière dont le hockey est joué, arbitré, analysé et même télévisé depuis plus d’un quart de siècle maintenant.

« Pensez à 2005, quand nous sommes sortis d’un arrêt de travail et que le hockey avait besoin d’une réinitialisation avec plusieurs changements aux règlements. Il a eu une grande influence là-dedans », a déclaré Ken Holland, l’ancien directeur général des Red Wings de Detroit et des Oilers d’Edmonton, qui a été intronisé au Temple de la renommée du hockey dans la catégorie des bâtisseurs en 2020. « Il est à la tête des directeurs généraux depuis plus de deux décennies, presque trois, et le sport n’a jamais été en aussi bonne santé. Il est une grande raison de ça. Il a dévoué sa vie au hockey. »

Campbell a assisté à un seul match de la LNH en personne lorsqu’il était petit, un duel entre les Blackhawks de Chicago et les Red Wings de Detroit au vieux Detroit Olympia. Il n’avait pas joué au Maple Leaf Gardens de Toronto avant d’évoluer dans les rangs juniors avec les Petes de Peterborough, au début des années 1970, quand ils affrontaient les Marlies de Toronto.

« Je n’aurais jamais pu jouer à Toronto », a lancé Campbell.

Il l’a fait une fois, alors qu’il jouait au baseball pendant l’été. C’est à ce moment-là qu’il a vu pour la première fois le Temple de la renommée du hockey au parc des expositions de Toronto, le domicile du panthéon du hockey avant qu'il déménage à son emplacement actuel, au coin des rues Yonge et Front.

« Là-bas, près de l’eau, il y avait le premier Temple de la renommée », a mentionné Campbell, pointant l’endroit depuis son bureau dans les quartiers généraux de la LNH à Toronto sur la rue Bay, près du Scotiabank Arena. « Je me souviens d’y être entré alors que je participais à un tournoi de baseball au mois d’août. C’était l’Exposition nationale canadienne. Il s’agissait d’une grande foire et il y avait un petit édifice, le Temple de la renommée. Je me souviens de l’avoir vu, et mon rêve était d’y être intronisé comme joueur un jour. »

Sa carrière de joueur ne le lui a pas permis. Il a inscrit 25 buts en 636 matchs en carrière dans la LNH avec les Penguins de Pittsburgh, les Rockies du Colorado, les Oilers d’Edmonton, les Canucks de Vancouver et les Red Wings de 1974 à 1985.

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Sa carrière d’entraîneur, même s’il a gagné la Coupe Stanley en 1994 comme adjoint avec les Rangers, n’a pas non plus été digne d’une intronisation au Temple.

Mais Campbell a été embauché par la LNH le 20 juillet 1998, après avoir été congédié par les Rangers lors de la pause olympique de 1998, après 57 matchs. Il a remplacé Brian Burke, qui venait de quitter pour devenir DG des Canucks. Il a découvert sa vocation, alors qu’il croyait initialement que ce serait une transition vers son prochain emploi comme entraîneur.

« Je n’avais aucune idée, a affirmé Campbell. Je m’attendais à faire ce travail pendant quelques années. Je me disais que ce serait une belle expérience. J’avais vérifié auprès de plusieurs anciens entraîneurs des Rangers, et la plupart avaient obtenu une autre chance après leur passage à New York. Tu as de la visibilité là-bas, et j’avais maintenu une bonne fiche, donc je pensais que j’allais décrocher un boulot ailleurs.

« Puis, ils ont oublié que j’étais un entraîneur parce que j’occupais ce poste et que je prenais plus de décisions de gestion. J’ai ensuite eu trois opportunités pour œuvrer dans la direction d’une équipe, et j’en ai même visité une : Philadelphie. Je me suis rendu là-bas, puis je me suis mis à douter. »

Colin Campbell press release

Plutôt que de s’en aller, Campbell a redoublé d’ardeur pour rendre le hockey meilleur et lui donner plus de visibilité.

La salle de révision vidéo à Toronto, là où chaque seconde de chaque match est diffusée et décortiquée et où les reprises vidéo sont analysées, est une création de Campbell.

Il dit avoir eu l’idée de cette salle quand il jouait à Detroit. La famille d’un de ses amis possédait un magasin d’électroménagers, avec une pièce fermée au fond du magasin dans laquelle il y avait toutes les télévisions dernier cri.

« Nous allions là-dedans pour regarder les matchs, a raconté Campbell. Mon ami avait l’une de ces immenses antennes satellites, donc nous pouvions regarder un peu plus de matchs, en plus de ceux qui étaient diffusés à la télévision. »

En 1998, ce ne sont pas toutes les rencontres qui étaient disponibles, car elles n’étaient pas toutes télévisées lorsque Campbell s’est joint à la Ligue. Personne n’était affecté à l’enregistrement et à la surveillance des matchs.

« Il fallait que les vidéos des matchs nous soient envoyées par NHL Productions, à Tappan, dans l’État de New York, ou que les équipes nous envoient des séquences vidéo s’ils voulaient que nous révisions quelque chose », s’est remémoré Damian Echevarrieta, le vice-président principal de la sécurité des joueurs et des opérations hockey que Campbell a engagé peu de temps après son arrivée. « C’est la raison pour laquelle vous entendez parfois des anciens du hockey dire : "Ils vont envoyer la vidéo à la Ligue." »

Campbell, Echevarrieta et Claude Loiselle ont mis en place la première salle de révision vidéo dans les anciens bureaux de la LNH à New York sur la 6e Avenue, à un jet de pierre du Radio City Music Hall.

Dire qu’il s’agissait d’une salle de fortune serait un euphémisme.

« La pièce était remplie de divers moniteurs et magnétoscopes qui enregistraient les matchs, que nous arrivions à diffuser dans l’édifice grâce à un petit satellite que l’on pointait vers la fenêtre dans l’une des salles de conférence, a raconté Echevarrieta. Un soir, je surveillais et enregistrais sept ou huit matchs, puis tout est devenu noir. Je n’avais aucune idée de ce qui s’était produit. L’équipe de ménage avait accidentellement baissé les rideaux, bloquant le signal satellite. »

À l’époque, Campbell occupait aussi les fonctions de préfet de discipline. Si un jeu était remis en question, il devait le voir.

Occasionnellement, il retournait à la maison en Ontario la fin de semaine pour rendre visite à sa famille. Les téléphones cellulaires et les courriels en étaient à leurs balbutiements, mais vous ne pouviez pas encore envoyer une vidéo. Donc, les rares fois où Echevarrieta avait une séquence que Campbell devait voir et qu’il n’était pas à New York, il devait improviser pour trouver une façon de la lui faire parvenir.

Echevarrieta apportait alors une cassette vidéo avec un enregistrement du jeu à l’aéroport LaGuardia. Il trouvait la porte d’embarquement du prochain vol d’Air Canada vers Toronto et remettait la cassette à un préposé en lui indiquant qu’un homme du nom de Colin Campbell attendrait à la porte de débarquement à Toronto pour l’obtenir.

Campbell devait retourner à la maison, glisser la cassette dans son magnétoscope et regarder la séquence avant de prendre une décision. Ce qui prend aujourd’hui quelques secondes prenait des heures à l’époque, sans compter les quelques obstacles à surmonter parfois.

« Si vous voyez la salle de révision vidéo du Département de la sécurité des joueurs ici à New York ou la nouvelle salle des opérations hockey à Toronto, qui sont à la fine pointe de la technologie, vous réaliserez à quel point nous avons progressé grâce au leadership de Colin », a dit Echevarrieta.

Regardez les matchs et vous le verrez également.

Campbell a supervisé de nombreux changements aux règlements à la suite de l’arrêt de travail dans la LNH en 2004-05. Ces modifications ont réduit l’obstruction et ouvert le jeu, permettant au talent et à l’attaque de s’exprimer, et aux joueurs plus petits d’avoir un plus grand impact.

Durant cet arrêt de travail, il a tenu des réunions avec les DG Don Waddell, Poile, Bob Gainey et Kevin Lowe, l’ancien propriétaire des Flyers de Philadelphie Ed Snider, les joueurs Trevor Linden, Martin Brodeur, Brendan Shanahan, Rob Blake et Mike Gartner ainsi que le commissaire de la LNH Gary Bettman.

« Nous avions des discussions importantes à propos de changements aux règlements, a dit Waddell. Malheureusement, nous avions beaucoup de temps pour en parler parce que nous ne jouions pas au hockey. Je dois dire que pour quelqu’un qui provenait de ce que nous appelons l’ancienne garde, il était très ouvert sur les façons de rendre le hockey meilleur et plus rapide. »

Campbell se souvient d’une conversation précise qu’il a eue avec Holland.

« Je me souviens d’avoir demandé à Kenny : "Qu’est-ce qu’une pénalité pour avoir accroché? Est-ce que tu dois accrocher deux ou trois fois avant que la pénalité soit décernée?", s'est remémoré Campbell. Il m’a répondu : "Deux si le joueur tombe, trois s’il reste debout." C’est fou, ce que nous laissions passer à l’époque et les pénalités que nous voulions voir être décernées. Ce qui m’a fait le plus peur en 2004-05, c’est quand j’ai entendu des joueurs dire qu’ils n’éprouvaient pas de plaisir à pratiquer le hockey avec les paramètres que j’avais mis en place. Nous avons dû trouver une façon de rendre le hockey divertissant. »

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Il se marque aujourd’hui plus d’un but par match en moyenne qu’en 2003-04, la dernière saison disputée avant les changements aux règlements. L’accent est mis sur la vitesse. Les coups de bâton, l’accrochage et les doubles-échecs sont punis de façon constante. Tout le monde à travers la Ligue – joueurs, entraîneurs, arbitres et DG – sait à quoi s’en tenir. Tout est regardé, enregistré, noté et révisé.

« Je dois attribuer du mérite à Gary parce qu’il m’a permis de faire ce travail et m’a soutenu, a dit Campbell. Après avoir établi un plan en 2004-05, ç’a été difficile de le livrer. Ce n’était pas facile d’appeler 15 pénalités à chaque équipe. Le faire de la bonne façon a été très difficile. »

Pour Campbell, la LNH est à un point où la question est : à quel point voulez-vous que le hockey soit parfait?

La réponse se trouve dans ce qui viendra ensuite.

« Il aime et respecte le hockey, et il veut qu’il soit le meilleur possible », a mentionné l’ancien attaquant des Rangers Adam Graves, qui a joué sous les ordres de Campbell à Detroit et à New York, et qui est encore proche de lui et de sa famille. « Le hockey a profité de son dévouement et de son amour. Ça paraît. Le hockey n’a jamais été aussi bon. C’est extraordinaire. Je ne peux pas vous exprimer à quel point j’aime le hockey d’aujourd’hui. Et on dirait que c’est de mieux en mieux. Colin a été un acteur important pour transporter le hockey où il est aujourd’hui. »

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